www.zejournal.mobi
Mercredi, 12 Nov. 2025

Scandale à la BBC : démission en cascade après un montage truqué d'un discours de Trump, et les ombres d'une ingérence médiatique transatlantique

Auteur : Xavier Azalbert | Editeur : Walt | Mardi, 11 Nov. 2025 - 15h14

Résumé pour les pressés : après la réélection triomphale de Donald Trump en novembre 2024, la BBC, fleuron de l’audiovisuel public britannique, est secouée par un séisme interne : le directeur général Tim Davie et la patronne de l’information Deborah Turness ont démissionné hier, englués dans un scandale de manipulation éditoriale. À l’origine, un documentaire diffusé une semaine avant le scrutin américain de 2024, qui a trafiqué un discours emblématique de Trump pour le faire passer en appel à la violence.

L’affaire éclate avec la fuite d’un mémo interne accablant, révélé par The Telegraph le 3 novembre. Intitulé Trump: une seconde chance ?, ce numéro de Panorama juxtapose malhonnêtement un appel à une « marche pacifique » du 6 janvier 2021 avec la phrase « nous nous battrons comme des diables », prononcée 54 minutes plus tard. Le montage, sans avertissement visuel, crée une séquence explosive : « Nous allons marcher vers le Capitole et nous nous battrons comme des diables. Si vous ne vous battez pas, vous n’aurez plus de pays. » Pire, des images d’émeutiers armés sont présentées comme postérieures au discours, alors qu’elles datent d’avant, comme l’avait prouvé BBC Newsnight en 2021.

Michael Prescott, ex-conseiller aux normes éditoriales, dénonce un « biais systémique » dans un rapport de 19 pages, comparant l’incident au scandale « Crowngate » de 2007. « Un précédent très dangereux », avertit-il. Davie, surnommé « Teflon Tim » pour sa résilience, assume les « erreurs » et annonce une « transition ordonnée » avant la révision de la Charte royale en 2027. Turness, elle, regrette les « dommages » à l’institution qu’elle « chérit », tout en niant un biais institutionnel.

La réaction de Trump est fulgurante : sur Truth Social, il fustige une « tricherie » visant à « influencer l’élection », « terrible pour la démocratie ». Sa porte-parole Karoline Leavitt traite la BBC de « machine de propagande à 100 % ». Géopolitiquement, c’est une gifle pour Londres, allié clé de Washington : la ministre de la Culture Lisa Nandy parle d’une affaire « très sérieuse » et exige une enquête parlementaire. Les conservateurs, menés par Kemi Badenoch, exigent une réforme radicale, tandis que Nigel Farage menace d’abolir la BBC, dont la redevance TV chute déjà de 20 %.

De l’autre côté de la Manche, les médias français ne sont pas épargnés. La presse hexagonale, de FranceTV à TF1 et BFM, a adopté une ligne ouvertement anti-Trump, sous-estimant sa victoire et favorisant Harris, comme le soulignent Valeurs Actuelles et Arrêt sur Images. Un sondage France-Soir révèle une défiance massive : 70 % des Français jugent ces chaînes « totalement non objectives », et 54 % veulent suspendre leurs subventions publiques. Antony Lacoudre, correspondant de France-Soir aux États-Unis, raille les « sondages biaisés, médias arrogants et experts bidons » qui ont masqué le « phénomène Trump ».

Ce scandale s’inscrit dans un écosystème toxique : Google avoue, dans une lettre au Congrès datée du 23 septembre, avoir cédé à des pressions de l’administration Biden pour censurer des contenus pro-Trump sur YouTube. En France, France-Soir – censuré pour ses analyses précoces sur le Covid – reste une exception, ayant prédit la victoire de Trump en se focalisant sur ses soutiens ouvriers et ruraux.

La Déclaration de Munich, charte éthique européenne, est bafouée : pas de place pour les « manipulations » (art. 3) ou la propagande (art. 9). Face à un Trump réélu promettant des représailles contre les « fake news », l’affaire interroge : les médias publics doivent-ils arbitrer ou relayer ? Pour l’heure, la BBC saigne, la presse française tangue, et la confiance démocratique vacille. Reste à savoir si ces chutes de têtes marqueront un vrai tournant.

*** Article complet ***

Au cœur de la tourmente post-électorale américaine, marquée par le triomphe inattendu de Donald Trump, le Royaume-Uni est frappé de plein fouet par un scandale qui ébranle sa vénérable BBC. Le 9 novembre, deux figures emblématiques démissionnent dans la foulée : Tim Davie, directeur général, et Deborah Turness, à la tête du service d'information. À l'origine, un simple montage d'un discours présidentiel datant du 6 janvier 2021, édité de manière trompeuse dans un documentaire diffusé pile avant le vote de 2024. Ce qui passe d'abord pour une bourde éditoriale révèle un biais profond, avec des ondes de choc qui questionnent l'impartialité des médias d'un allié stratégique des États-Unis. De l'autre côté de la Manche, les échos résonnent chez les médias français, tandis que les confessions de Google sur sa censure politique jettent une lumière crue sur les collusions entre presse et géants du numérique. Cet article décrypte cette affaire explosive aux ramifications mondiales.

L'affaire BBC, un discours « maquillé » qui fait tomber les têtes

Tout part d'un documentaire diffusé le 28 octobre 2024, soit une semaine avant le scrutin américain opposant Donald Trump à Kamala Harris. Intitulé Trump: A Second Chance?, ce numéro spécial du magazine d'investigation Panorama de la BBC visait à explorer les chances d'une réélection de l'ancien président. Produit en interne par le journaliste Matthew Hill et édité par Karen Wightman, le programme a été retiré de la plateforme iPlayer un an plus tard, conformément aux règles internes. Mais c'est un mémo interne fuité, compilé par Michael Prescott – ancien conseiller indépendant au comité des normes éditoriales de la BBC – qui met le feu aux poudres.

Révélé par The Telegraph le 3 novembre 2025, ce document de 19 pages dénonce un "biais systémique" au sein de la BBC, avec un focus sur des manipulations éditoriales flagrantes. L'incident central ? Un extrait du discours prononcé par Trump le 6 janvier 2021, jour de l'assaut sur le Capitole par ses partisans. Dans la version originale, Trump exhorte ses soutiens à « marcher pacifiquement et patriotiquement vers le Capitole pour faire entendre [leurs] voix » (phrase du début du discours), avant d'ajouter plus de 54 minutes plus tard : « nous nous battrons comme des diables » en référence aux élections qu'il jugeait truquées. La BBC a joint ces segments pour créer une séquence fluide et trompeuse : « Nous allons marcher vers le Capitole et nous nous battrons comme des diables. Si vous ne vous battez pas comme des diables, vous n'aurez plus de pays. » Aucune indication visuelle n'a signalé cette édition tel que la déontologie journalistique le demande, et une musique menaçante a amplifié l'impression d'incitation à la violence.

Pire, le documentaire a présenté des images d'hommes armés de drapeaux marchant vers le Capitole après le discours, suggérant une réponse directe à l'appel de Trump. En réalité, ces séquences datent d'avant le discours, comme l'avait établi une enquête de BBC Newsnight en février 2021 sur les Proud Boys. Prescott, qui avait quitté son poste en juin 2025 par « désespoir » face à l'inaction de la direction, compare ces pratiques au scandale « Crowngate » de 2007, qui avait forcé une démission.

Les démissions tombent comme un couperet le 9 novembre 2025. Tim Davie, en poste depuis 2020 et surnommé « Teflon Tim » pour avoir survécu à de multiples crises, assume les « erreurs » et annonce son départ pour une « transition ordonnée » en vue de la révision de la Charte royale de la BBC en 2027. Deborah Turness, aux commandes de BBC News depuis 2022, offre sa démission dès le samedi précédent, déclarant que « la controverse cause des dommages à la BBC » qu'elle chérit, tout en niant un biais institutionnel. Le président du conseil BBC, Samir Shah, qualifie la journée de « triste » et assure une passation fluide.

Conséquences d’une ingérence d'un allié qui fragilise les liens transatlantiques

Ces manipulations ne sont pas anodines : diffusées juste avant l'élection, elles ont potentiellement influencé l'opinion publique britannique – et par ricochet, internationale – en présentant Trump comme un instigateur direct des émeutes du Capitole. Donald Trump réagit fermement sur Truth Social, accusant la BBC de « tricherie » sur son discours « parfait » et de tentative d'« influencer l'élection », ce qui est « terrible pour la démocratie ». Sa porte-parole, Karoline Leavitt, traite la BBC de « machine de propagande à 100 % ». Donald Trump Jr. en rajoute une couche sur X, qualifiant l'institution de « fausses nouvelles ».

Géopolitiquement, c'est une claque pour le Royaume-Uni, allié historique des États-Unis. La secrétaire d'État à la Culture, Lisa Nandy, qualifie l'affaire de « très sérieuse » et évoque un « biais systémique » dans la couverture de sujets sensibles, comme la guerre Israël-Gaza ou les questions transgenres. Elle exige des excuses et une enquête parlementaire, avec une audition prévue lundi devant le comité Culture, Médias et Sport. Les conservateurs, via Kemi Badenoch, parlent d'un « catalogue d'échecs graves » et appellent à une réforme radicale, sous peine de voir la redevance TV – qui finance la BBC – s'effondrer (déjà en baisse de 20 % ces dernières années). Nigel Farage, leader de Reform UK, y voit la « dernière chance » pour la BBC, menaçant de son abolition pure et simple.

À plus long terme, l'affaire mine la crédibilité de la BBC comme « marque d'information la plus confiée au monde », comme le martèle Davie dans sa lettre de démission. Elle complique les négociations sur la Charte royale, expirant en 2027, où le gouvernement travailliste de Keir Starmer pourrait durcir les exigences d'impartialité. Et sur le plan bilatéral, elle ravive les tensions post-Brexit : un média d'État allié accusé d'ingérence électorale contre un candidat républicain pourrait compliquer les dossiers comme l'Ukraine ou le commerce.

Les médias français dans le même bateau ? Un biais anti-Trump patent

La France n'est pas en reste. Comme le soulignent plusieurs analyses, la presse hexagonale a adopté une posture ouvertement hostile à Trump durant la campagne 2024, sous-estimant systématiquement sa popularité et favorisant Kamala Harris. 

Valeurs Actuelles accuse carrément une partie de la presse française d'avoir « pris fait et cause contre Donald Trump », alors que les médias US jouaient la prudence. Des députés de droite, lors d'une audition à l'Assemblée nationale le 7 novembre 2024, dénoncent un « parti pris anti-Trump » dans l'audiovisuel public, le qualifiant de « succursale du Parti démocrate ». Arrêt sur Images note que « les journalistes ont du mal à apprendre de leurs erreurs » passées, comme en 2016 ou 2020, où Trump était systématiquement présenté comme perdant. Des enquêtes comme celle d'Émile Magazine révèlent que les reporters français, formés à Sciences Po, ont couvert la campagne avec un regard biaisé, focalisé sur les « débordements verbaux » de Trump plutôt que sur ses soutiens populaires. Ouest-France parlait d'une « couverture sans précédent », mais d’autres décrivent un « super combat arbitré par la presse » en faveur de Harris. 

Résultat : stupeur post-électorale, avec les explications d’Antony Lacoudre, correspondant de France-Soir aux Etats-Unis qui expliquait «  l’arnaque des sondages biaisés, des médias arrogants et des experts bidons » après avoir déclaré avant les élections : « les médias qui font croire que la course est serrée ne sont pas très honnêtes avec leur public ».

Cette partialité n'est pas un secret pour le public français, qui exprime une défiance croissante envers les grands médias. Selon un sondage récent publié par France-Soir, 70 % des Français estiment que les chaînes comme TF1, France Télévisions ou BFM manquent totalement d'objectivité, alimentant un sentiment de manipulation et de « peur et mensonges » dans l'information quotidienne. Et 54 % demandent explicitement la suspension des aides et subventions publiques à ces médias, signe d'une crise de confiance plus large mêlant désillusion économique et scepticisme politique. Ces chiffres, issus d'enquêtes sur la perception des médias, soulignent comment le biais anti-Trump n'est que la pointe de l'iceberg d'une presse perçue comme déconnectée du réel.

Ce biais n'est pas anodin : en France, où l'opinion sur Trump est majoritairement négative (seulement 20 % d'image positive en 2025, selon Statista, mais 69% des Français soutiennent Trump dans sa quête pour la paix en Ukraine selon un sondage MIS Group), il renforce une narrative anti-américaine conservatrice, potentiellement influencée par des élites pro-européennes. Contrairement à la BBC, pas de démissions en vue, malgré un budget fortement déficitaire, et des preuves de plus en plus accablantes de traitement non impartial du pluralisme accompagné d’appels croissants à une régulation plus stricte de l'ARCOM. Devant la pression, et au nom du pluralisme, FranceTV étend son plan de transparence de son offre d’information en proposant de publier mensuellement la liste intégrale de ses invités, experts, membres de la société civile. 

Un observateur avertit des médias français déclare : « on se demande bien pourquoi cela n’a pas été fait plus tot alors que le pluralisme a été consacré dans la loi du 14 novembre 2016 » avant d’ajouter « malgré cela le parti pris continue avec le scandale Patrick Cohen et ses liens avérés pour promouvoir le candidat du PS à la mairie de Paris ».

Le rôle des médias : partisan jusqu'à bafouer la Charte de Munich ?

 Est-ce vraiment le rôle d'un média public ou influent d'être partisan au point de manipuler des faits ? La Déclaration de Munich (1971, révisée en 2011), charte éthique des médias audiovisuels européens signée par la France et le Royaume-Uni, impose l'impartialité, la véracité et le respect de la dignité humaine. L'article 3 interdit les « manipulations » qui pourraient influencer l'opinion publique de manière déloyale. Le montage BBC viole ces principes en altérant un discours historique pour servir une thèse anti-Trump, transformant un appel à la protestation pacifique en appel aux armes.

De même, les biais français – omission des soutiens ouvriers de Trump, amplification de ses gaffes – flirtent avec la « partialité » proscrit par l'article 9 (Ne jamais confondre le métier de journaliste avec celui du publicitaire ou du propagandiste). Dans un monde polarisé, où les élections US impactent la géopolitique mondiale (de l'OTAN à l'Ukraine), ces dérapages ne sont plus des « erreurs » isolées : ils deviennent des armes hybrides, érodant la confiance démocratique. Comme le dit Prescott dans son mémo, c'est un « précédent très dangereux ».

Les réseaux sociaux et les aveux de Google et la censure orchestrée

Le scandale BBC s'inscrit dans un écosystème plus large, où Big Tech joue les complices de Big Media. Le 23 septembre 2025, Google (via Alphabet) admet dans une lettre au Congrès US avoir subi des « pressions inacceptables » de l'administration Biden pour censurer du contenu sur YouTube, y compris non violent, lié au COVID-19 et aux élections 2020. Plus de 40 documents internes révèlent des interventions de la Maison Blanche pour supprimer des vidéos sur les origines du virus ou les fraudes électorales présumées, même sans violation des règles internes.

Ces aveux, sous enquête depuis 2023 par le républicain Jim Jordan, touchent directement les élections : YouTube a modéré des discours pro-Trump sous prétexte de « désinformation », favorisant Harris. En Europe, l'exemple de France-Soir est éloquent : suspendue en 2021 pour « non respect des règles de la communauté » en d’autres termes une prétendu « désinformation COVID », la chaîne a perdu 60 % de son audience après désindexation de 55 000 articles par Google – dont moins de 3 % concernaient le virus. Des prévisions « trop précoces »’ (origine labo du virus, doutes sur l'hydroxychloroquine) se sont avérées justes, mais censurées sous pression politique.

Sur X (ex-Twitter), Meta et TikTok, des algorithmes biaisés ont amplifié les contenus anti-Trump, comme l'ont révélé des fuites internes. Cette « censure douce » – suppression, déboosting – complète les manipulations médiatiques, formant un front uni contre des voix dissidentes.

Une exception française, France-Soir, l'indépendant qui a vu venir Trump

Au milieu de ce concert de biais, un média français fait figure d'exception : France-Soir. Un des rares médias de l’hexagone à avoir couvert les élections américaines 2024 de manière totalement indépendante, sans parti pris ni sous-estimation de Trump. France-Soir aura analysé l'ampleur du « phénomène Trump » dès les sondages initiaux, prédisant sa victoire là où d'autres tablaient sur une défaite cuisante. 

Refusant les narratifs dominants, France-Soir a mis l'accent sur les dynamiques socio-économiques soutenant Trump (ouvriers, ruraux), et dénoncé les pressions sur les Big Tech – y compris son propre combat judiciaire contre Google, perdu en première instance (appel en cours) mais révélateur.

Vers une information libérée des chaînes partisanes ?

Les démissions à la BBC marquent un tournant, mais suffiront-elles ? Face à un Trump réélu qui promet des représailles contre les « fake news », l'affaire interroge l'avenir des médias publics : doivent-ils être des arbitres impartiaux ou des relais partisans ?

La Charte de Munich, les aveux de Google et les biais français rappellent que l'ingérence médiatique – qu'elle soit éditoriale ou algorithmique – menace la souveraineté électorale. Dans ce chaos, des voix comme France-Soir montrent qu'une presse indépendante est possible, et nécessaire, pour restaurer la confiance.

À la BBC comme ailleurs, le temps des excuses est passé : place à des réformes pour que l'information redevienne un bien public, et non une arme politique.

***

source : Aldo Sterone

 


- Source : France-Soir

Cela peut vous intéresser

Commentaires

Envoyer votre commentaire avec :



Fermé

Recherche
Vous aimez notre site ?
(230 K)
Derniers Articles
Articles les plus lus
Loading...
Loading...
Loading...
 
 

Contribuer au journalisme de ZeJournal

Faites un don pour nous aider à poursuivre notre mission d’information

Faire un don

( En savoir plus )