Espionnage pour le compte de l’ennemi : méfiez-vous des organisations «intergouvernementales»

Le 13 juin, l’entité sioniste a mené une attaque militaire criminelle et non provoquée contre l’Iran. Bien que son impact ait été limité, la riposte de Téhéran ayant été bien plus dévastatrice, l’assassinat ciblé par Israël d’un certain nombre de scientifiques nucléaires iraniens indique que Tel-Aviv connaissait leur identité et leur localisation. Par coïncidence, la veille de l’attaque, Press TV a publié des documents indiquant que l’Agence internationale de l’énergie atomique a précédemment fourni aux services du renseignement israéliens les noms de plusieurs scientifiques nucléaires iraniens qui ont ensuite été assassinés.
D’autres documents indiquent que le chef de l’AIEA, Rafael Grossi, entretient des relations étroites et clandestines avec des responsables israéliens et a souvent agi sur leurs ordres. Ces dossiers font partie d’une vaste collectionobtenue par le ministère iranien du Renseignement, qui contient des informations sans précédent sur les capacités secrètes et illégales de Tel-Aviv en matière d’armes nucléaires, ainsi que sur ses relations avec l’Europe, les États-Unis et d’autres pays, entre autres révélations fracassantes. Cette série de documents pourrait bien apporter un éclairage supplémentaire sur la collusion cynique et meurtrière de l’AIEA avec l’entité.
Confirmant les interprétations selon lesquelles l’AIEA aurait aidé Israël à mener son attaque contre l’Iran le 13 juin, le Conseil des gouverneurs de l’Agence a déclaré la veille que Téhéran “a enfreint ses obligations en matière de non-prolifération”. La justification théorique de cette conclusion, qui a fourni à Tel-Aviv un prétexte propagandiste pour son attaque illégale, était un rapport de l’AIEA publié deux semaines auparavant. Ce document ne fournissait aucune nouvelle information – ses accusations douteusesconcernaient “des activités remontant à plusieurs décennies” sur trois sites où, jusqu’au début des années 2000, “des matières nucléaires non déclarées” auraient été manipulées.
Aux termes de l’accord conclu en juillet 2015 entre Téhéran et l’administration Obama, l’AIEA s’est vu accorder pendant des années un accès illimité aux complexes nucléaires iraniens afin de s’assurer que la République islamique n’utilise pas ces installations pour développer des armes nucléaires. Les inspecteurs de l’Agence ont recueilli de nombreuses informations sur et à l’intérieur des sites, notamment des photos prises par des caméras de surveillance, des données de mesure et des documents. La question de savoir si ces informations ont été partagées avec l’entité sioniste et ont contribué de quelque manière que ce soit à son attaque du 13 juin est évidente.
Malgré la perspective d’une guerre entre l’Iran, Israël et ses alliés occidentaux, le président américain Donald Trump s’est montré optimiste quant à sa capacité à négocier la paix entre Téhéran et l’entité sioniste et à finaliser un nouvel accord nucléaire avec la République islamique. Ces deux résultats escomptés semblent hautement improbables. Il y a aujourd’hui que fort peu de chances que les inspecteurs de l’AIEA soient à nouveau autorisés à s’approcher des sites nucléaires iraniens, compte tenu des relations secrètes et étroites de l’Association avec les responsables de Tel-Aviv et de sa complicité dans ses attaques anciennes et à venir.
Les États du monde entier, en particulier ceux qui sont dans le collimateur de l’Empire et de ses divers mandataires et marionnettes, devraient réfléchir à deux fois avant d’accorder l’entrée sur leur territoire non seulement aux représentants de l’AIEA, mais aussi à toute une panoplie d’organisations internationales et intergouvernementales prétendument neutres. Surtout si celles-ci cherchent à accéder à des informations et à des installations sensibles.
Il est presque inévitable que les informations recueillies lors de telles opérations soient partagées, au détriment des pays et des gouvernements qui ont autorisé ces entités à accéder à leur territoire.
“Des données de ciblage très précises”
Fondée en 1975, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) est une entité intergouvernementale dont les États membres sont issus d’Asie, d’Europe et d’Amérique du Nord.
Partout dans le monde, ses observateurs surveillent les élections et le respect des droits de l’homme par les gouvernements étrangers, et sont fréquemment envoyés dans des zones de guerre ou d’instabilités afin de garder un œil sur les événements sur le terrain. Sa mission officielle est la gestion des crises et la prévention des conflits. Pourtant, les activités de l’OSCE en Yougoslavie durant la fin des années 1990 démontrent amplement son utilité pour fomenter des conflits.
Au cours de la seconde moitié de cette décennie, les autorités yougoslaves se sont livrées à une brutale contre-insurrection contre l’Armée de libération du Kosovo (UCK). Groupe extrémiste lié à Al-Qaïda, armé, financé et entraîné par la CIA et le MI6, l’UCK cherchait à développer une “Grande Albanie” ethniquement pure – un projet irrédentiste d’inspiration nazie, réunissant Tirana et des territoires de Grèce, de Macédoine, du Monténégro et de Serbie – par le biais d’une insurrection violente. En septembre 1998, les hostilités ont dégénéré en une guerre totale. Une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU adoptée ce mois-là a exigé des deux parties qu’elles respectent un cessez-le-feu.
Les forces militaires yougoslaves ont été dûment retirées de la province, mais l’UCK a profité de l’absence de l’armée pour intensifier ses exactions sanglantes, s’emparant de nouveaux territoires et purgeant la population non albanaise. Une unité spéciale de l’OSCE, la Mission de vérification au Kosovo, a également été créée pour veiller au respect du cessez-le-feu par Belgrade. La KVM a obtenu le droit de circuler librement et sans entrave partout où elle le souhaitait dans la région. Sa présence s’est avérée cruciale non seulement pour la croisade meurtrière de l’UCK, mais aussi pour les bombardements criminels de l’OTAN contre la Yougoslavie entre mars et juin 1999.
Comme l’a rapporté une commission parlementaire britannique en mai 2000, la KVM a “démarré graduellement” le 25 octobre 1998 avec seulement 50 membres. Ce chiffre a toutefois rapidement augmenté, Londres
“menant les actions pour envoyer des vérificateurs sur le terrain le plus rapidement que possible”, la majorité d’entre eux étant “des militaires”.
En peu de temps, la mission de l’OSCE comptait 1 500 personnes – sans que le rapport ne le mentionne, de nombreux observateurs de la KVM étant des vétérans des services du renseignement issus des rangs des États membres de l’OTAN, parmi lesquels une prépondérance d’espions de la CIA.
En mars de cette année-là, The Times a révélé comment la KVM a été “absorbée” par la CIA, qui poursuivait un “programme” entraînant “les frappes aériennes”. Des agents de l’agence infiltrés au sein de l’OSCE
“ont admis avoir aidé à former” l’UCK et “sapé les efforts visant à trouver une solution politique au conflit” au Kosovo. Cela comprenait “la fourniture de manuels d’entraînement militaire américains et de conseils sur le terrain pour lutter contre l’armée yougoslave et la police serbe”
au profit des milices séparatistes. Un agent de la CIA a qualifié la KVM de “façade de la CIA”. Un autre a admis :
“Je disais [à l’UCK] quelle colline éviter, derrière quel bois se cacher, ce genre de choses”.
The Times a également révélé qu’avant le début des bombardements de l’OTAN sur la Yougoslavie,
“de nombreux téléphones satellites et systèmes de localisation GPS” de la KVM ont été “remis en secret à l’UCK, afin que les commandants de la guérilla puissent rester en contact avec l’OTAN et Washington” tout au long de la campagne. L’opération allait jusqu’à permettre à “plusieurs dirigeants de l’UCK”
d’avoir en leur possession le numéro de téléphone portable du général américain Wesley Clark, qui supervisait les bombardements. De plus, les informations recueillies par l’OSCE durant sa mission au Kosovo ont joué un rôle crucial dans la planification de cette opération destructrice.
Durant le procès du dirigeant yougoslave Slobodan Milosevic devant le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, de nombreux témoins de la défense et de l’accusation – dont d’anciens membres de l’OSCE – ont témoigné du rôle néfaste joué par la KVM dans la préparation du bombardement de Belgrade par l’OTAN. Un colonel de l’armée yougoslave, souffrant de graves problèmes de santé dus à l’utilisation illégale d’uranium appauvri par l’OTAN pendant la campagne, a donné des informations détaillées sur la manière dont les membres de la Mission repéraient régulièrement et intensivement les installations militaires yougoslaves, prenant des notes exhaustives à chaque étape :
“L’armée de l’air de l’OTAN disposait de données [de ciblage] très précises qui ont été accumulées en 1998 et 1999 précisément par les membres de la commission de vérification… [La KVM] venait très souvent, très fréquemment, visiter [ma] caserne… Je les ai surpris à plusieurs reprises en train de prendre les coordonnées des installations et des points de repère et de dessiner des cartes du réseau de communication, et ils étaient bien entraînés… Il y avait beaucoup d’officiers à la retraite. Ils disposaient d’excellentes cartes, de cartes satellites. Ils avaient des GPS… pour repérer automatiquement les coordonnées dans l’espace au-dessus du territoire”.
“Des preuves directes”
Avance rapide jusqu’en mars 2014, où des observateurs de l’OSCE ont été déployés en Ukraine, alors que le sud et l’est du pays sombraient dans la guerre civile à la suite du coup d’État de Maidan orchestré par l’Occident. Leur présence et leur rôle dans le conflit n’ont pratiquement jamais été reconnus par les médias grand public au cours de leurs huit années passées sur le terrain. Ils ont été retirés en mars 2022, à la suite du déclenchement d’un conflit par procuration total dans le pays un mois auparavant.
On pourrait supposer que l’omerta médiatique sur les activités de l’OSCE dans le Donbass découle de ce que leurs observations contredisaient complètement la position officielle de plusieurs gouvernements occidentaux, de leurs armées et de leurs services du renseignement, ainsi que celle de l’Ukraine et des médias occidentaux. À savoir que la guerre civile dans le Donbass n’était pas une invasion russe, mais la répression brutale de Kiev contre la population russophone de la région. En octobre 2018, Alexander Hug, chef adjoint de la mission locale de l’OSCE, a été interrogé par le magazine Foreign Policy sur la “position officielle de son agence concernant l’implication de la Russie”.
Hug a répondu que l’OSCE n’a vu “aucune preuve directe” de cela. L’article a ensuite été mis à jour, Hug ayant révisé sa réponse : il affirmait que des observateurs auraient en fait été témoins des “convois” de nature indéterminée “entrant et sortant d’Ukraine” pendant la nuit, de “types spécifiques d’armes”, de prisonniers russes présumés en détention et d’individus portant des vestes “avec l’insigne de la Fédération de Russie”. Il a néanmoins souligné que ces articles peuvent être achetés “n’importe où” et qu’il a également vu des vêtements militaires portant les insignes de “l’Allemagne, de l’Espagne et d’autres pays” dans le Donbass.
Il ne serait pas surprenant que ces maigres informations aient été fournies à Foreign Policy par Hug sous la contrainte d’acteurs inconnus. Néanmoins, sa réponse initiale spontanée est d’autant plus remarquable, puisque’il est désormais évident que la mission de l’OSCE en Ukraine a été fortementcompromise et infiltrée. Non seulement ses observateurs n’ont pas signalé les graves violations du cessez-le-feu commises par Kiev, mais ils ont également fourni des informations sensibles à l’OTAN et aux forces ukrainiennes.
En septembre 2023, un observateur britannique de l’OSCE a été condamné par contumace par un tribunal russe pour avoir fourni à l’OTAN des cartes satellites détaillées des installations militaires de la République populaire de Lougansk, qui a fait sécession. Cet espionnage a permis aux forces ukrainiennes de mener des attaques contre ces sites, causant des pertes humaines et des dégâts matériels importants. L’ancien ambassadeur de Grèce à Kiev a affirmé que ce partage de renseignements était courant. Il a également été allégué qu’un observateur russe de l’OSCE a été assassiné en 2017, dans le but explicite d’expulser de la mission.
L’Iran, faisant preuve de sagesse, n’est pas membre de l’OSCE et n’autorise pas ses “observateurs” à accéder à son territoire. Néanmoins, l’Organisation s’intéresse de près au programme nucléaire prétendument illégal de Téhéran. En juin 2012, une délégation de l’OSCE a déclaré : “Nous ne pouvons plus ignorer les implications pour la sécurité internationale d’un Iran nucléaire”. Elle a en outre souligné que l’Iran est voisin de plusieurs membres de l’OSCE, à savoir l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Turquie et le Turkménistan, suggérant que ces pays pourraient d’une manière ou d’une autre contribuer à neutraliser les prétendues ambitions nucléaires de la République islamique.
Compte tenu des révélations fracassantes sur la collusion de l’AIEA avec les Israéliens et des antécédents déplorable d’autres organisations “intergouvernementales” affiliées à l’ONU telles que l’OSCE, il est inconcevable que Téhéran soit disposé à permettre à une quelconque entité internationale de jouer un rôle dans la médiation de son conflit avec le régime israélien. Tous les pays non occidentaux seraient bien avisés de suivre son exemple.
Traduit par Spirit of Free Speech
Image en vedette : Illustration © Mahdi Rteil pour Al Mayadeen English
- Source : Al-Mayadeen (Liban)