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Lundi, 05 Mai 2025

Elbridge Colby, l’homme derrière la politique chinoise de Trump ?

Auteur : Mike Whitney | Editeur : Walt | Lundi, 05 Mai 2025 - 14h12

Les droits de douane imposés par Trump font partie d’une stratégie à plusieurs volets qui consiste à empêcher la Chine de devenir la puissance dominante en Asie. La composante militaire de cette stratégie est conçue pour fonctionner en parallèle avec la guerre commerciale en encerclant la Chine avec des bases militaires et des voisins hostiles engagés dans l’alliance anti-chinoise de Washington. L’auteur de ce plan d’endiguement est Elbridge Colby, qui occupe actuellement le poste de sous-secrétaire à la Défense chargé de la politique, une fonction clé au Pentagone qui participe à l’élaboration de la politique de défense.

Colby n’est pas un néoconservateur. En fait, sa nomination a été contestée au Sénat au motif qu’il n’était pas suffisamment engagé contre l’Iran, qu’il ne considère pas comme une menace sérieuse pour la sécurité nationale des États-Unis. Colby est focalisé sur la Chine, qu’il considère comme une menace existentielle pour “l’ordre international fondé sur des règles”. Voici quelques extraits de la Stratégie de défense nationale 2018, un document fortement influencé par Colby. Ces extraits soulignent à quel point les élites occidentales se sentent menacées par la Chine et pourquoi (selon elles) elles doivent agir pour protéger leurs intérêts :

“La Chine et la Russie compromettent désormais l’ordre international au sein même du système en exploitant ses avantages tout en sapant ses principes et ses “règles du jeu”. (Stratégie de défense nationale 2018, p. 2) https://www.dau.edu/sites/default/files/Migrated/CopDocuments/2018%20National%20Defense%20Strategy%20Summary.pdf

“La Chine mise sur la modernisation militaire, les opérations d’influence et une économie prédatrice pour contraindre ses voisins à réorganer la région indo-pacifique à son avantage”. (NDS 2018, p. 2)

“Le principal défi pour la prospérité et la sécurité des États-Unis est la réémergence d’une concurrence stratégique à long terme opposant ce que la Stratégie de sécurité nationale qualifie de puissances révisionnistes. Il est de plus en plus évident que la Chine et la Russie veulent façonner un monde conforme à leur modèle autoritaire, en obtenant un droit de veto sur les décisions économiques, diplomatiques et sécuritaires des autres nations”. (NDS 2018, p. 1)

La NDS 2018 de Colby marque la fin de la guerre contre le terrorisme et le début d’une “compétition entre grandes puissances”. Elle représente un rééquilibrage stratégique des actifs américains de l’Europe de l’Est et du Moyen-Orient vers l’Indo-Pacifique. Elle suggère également que les États-Unis seront impliqués dans des types de conflits différents de ceux qu’ils ont connus au cours des 20 dernières années, des conflits qui nécessitent des armes conventionnelles, des troupes de combat et une capacité industrielle robuste plutôt que des actions secrètes, des guerres de guérilla et des systèmes d’armes sophistiqués. La guerre revient à sa forme originale, un affrontement mortel et destructeur entre États souverains.

Comme on l’a déjà souligné, l’objectif principal de Colby est d’empêcher la Chine de devenir la puissance hégémonique de la région asiatique. Pour atteindre cet objectif, il recommande une politique de dissuasion avancée (davantage de bases, de troupes et d’armes létales), la formation de solides coalitions régionales anti-chinoises et “une réforme du Pentagone capable de réagir rapidement aux développements en Asie”.

Colby considère que sa politique n’est ni provocatrice ni escalatoire, juste le meilleur moyen de préserver la place des États-Unis dans l’ordre mondial.

Concrètement, il préconise The Strategy of Denial (La stratégie du déni) (le titre de son livre publié en 2021), un programme qui s’attache à empêcher la Chine d’atteindre l’hégémonie régionale en lui imposant des obstacles trop coûteux à surmonter. L’objectif est de convaincre la Chine que toute tentative d’échapper au blocus de Washington (par la force militaire) entraînera des pertes inadmissibles. Cette stratégie du déni est la politique opérationnelle de facto de l’administration Trump.

Sans surprise, Colby considère sa stratégie comme un moyen d’éviter la guerre, et non d’en déclencher une. Voici ce qu’il dit :

“L’objectif n’est pas de faire la guerre, mais de la dissuader en faisant clairement comprendre à Pékin qu’il ne peut pas atteindre ses objectifs agressifs, en particulier contre Taïwan ou d’autres alliés clés”. (Article publié dans Foreign Affairs, octobre 2021)

Les “objectifs agressifs” de la Chine ? Les États-Unis provoquent la Chine sur son propre terrain tout en affirmant, en vertu de la doctrine Monroe, leur contrôle sur tout l’hémisphère. Voici à nouveau Colby :

“Taïwan est le pivot de la première chaîne d’îles, et si elle tombait aux mains de la Chine, cela compromettrait fondamentalement la position stratégique des États-Unis en Asie, enhardirait Pékin et affaiblirait nos alliances”. (The Strategy of Denial, p. 87)

“Défendre Taïwan ne relève pas du sentimentalisme, mais d’un intérêt stratégique pur et dur. Si la Chine contrôle Taïwan, elle dominera le Pacifique occidental, menaçant le Japon, les Philippines et notre crédibilité”. (Témoignage devant la commission sénatoriale des forces armées, janvier 2025)

Ce qui ressort de la politique de Trump, c’est que les États-Unis ont l’intention de refuser à la Chine l’accès à une île (Taïwan) dont ils ont déjà reconnu la souveraineté légale (politique d’une Chine unique), puis de provoquer Pékin en menant des exercices navals dans le détroit de Taïwan ou en mer de Chine méridionale ? Est-ce bien là leur plan ?

En quoi cela diffère-t-il de la politique de Biden ?

Les États-Unis n’utilisent-ils pas déjà leurs agences du renseignement et leurs ONG pour renforcer le mouvement indépendantiste à Taïwan ? Les États-Unis n’arment-ils pas déjà “Taïwan jusqu’aux dents” dans un mépris affiché pour le gouvernement de Pékin ? Les États-Unis ne construisent-ils pas déjà davantage de bases militaires, ne renforcent-ils pas leurs alliances anti-chinoises et ne sont-ils pas une source de nuisance partout où ils passent dans la région indo-pacifique ?

Le ton retenu et la rhétorique obséquieuse de Colby font passer sa politique de “déni” pour plus inoffensive qu’elle ne l’est en réalité. En vérité, cette stratégie n’est qu’une version 2.0 de la politique d’endiguement : plus de harcèlement, plus d’intimidation et plus de provocation, comme on le voit depuis plus d’une décennie.

Il va sans dire que les opinions de Colby sur la Chine sont très proches de celles de Trump. Tous deux considèrent la Chine comme le principal ennemi stratégique des États-Unis, soutiennent le renforcement des alliances anti-chinoises dans la région et souhaitent renforcer la dissuasion militaire américaine. Si la rhétorique de Trump est peut-être plus incendiaire que celle de Colby, tous deux semblent d’accord quant à la nécessité de traiter la Chine par la manière forte.

Naturellement, la Chine craint que l’approche conflictuelle de Trump ne déclenche un incident qui serve de prétexte à la guerre. La Chine préférerait engager le dialogue diplomatique avec les États-Unis pour voir si les parties peuvent résoudre leurs différends pacifiquement, mais cette option n’est peut-être pas envisageable. Après tout, l’administration américaine est exclusivement composée de partisans de la ligne dure, de néoconservateurs et de bellicistes. L’équipe Trump ne compte aucune “blanche colombe”, pas plus que l’ensemble de l’establishment de la politique étrangère. Ce qui signifie que la “paix” ne sera pas à l’ordre du jour.

Remarque — À la question – posée à Grok AI – d’identifier ne serait-ce qu’une seule “colombe” occupant un poste de pouvoir au sein de l’administration Trump ou de l’establishment américain en matière de politique étrangère, le seul nom que Grok a pu trouver est celui de Rand Paul, qui ne fait partie ni de l’administration, ni de l’establishment en matière de politique étrangère. Le nombre de partisans de la paix au sein du gouvernement est donc nul.

Traduit par Spirit of Free Speech


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