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Lundi, 06 Oct. 2025

Pétrolier «fantôme» arraisonné au large de Saint-Nazaire ou comment jouer à se faire peur

Auteur : François Meylan | Editeur : Walt | Dimanche, 05 Oct. 2025 - 13h43

Le «Pushpa», pétrolier de 244 mètres de long, immatriculé IMO 9332810, avec pavillon de complaisance de l’État du Bénin se trouvait dans les eaux internationales à plus de 40 km des côtes françaises. Son port de destination était Vadinar en Inde.

Il a été arraisonné par la gendarmerie maritime française, mercredi 1er octobre 2025, dans la seconde partie de l’après-midi.

En l’état actuel, la seule chose qu’on puisse lui reprocher est d’être resté un peu longtemps à la hauteur de Saint-Nazaire, parc éolien. Soit depuis le 28 septembre pour une raison que l’on ignore … Avarie ? Problème sanitaire ? Etc..

Pour pouvoir l’arraisonner dans les eaux internationales, le parquet de Brest a dû ouvrir une enquête préliminaire pour déclencher ce qu’on appelle communément le «droit de visite». À charge : «refus d’obtempérer» et «défaut de justification de la nationalité du navire/pavillon».

Nous y voyons, avant toute chose, une nouvelle opération de communication de la part du président Macron qui avec ses camarades otaniens aime jouer à se faire peur. «Il n’y a plus que ça ! Ils sont tous sûrs, mais ils n’ont aucune preuve». dixit le colonel EMG Boris Chollet, ancien des Renseignements militaires suisses. Avec de grandes déclarations impliquant les Russes dans la constellation des «actions de guerre hybride» ou encore de «la guerre informationnelle».

Par ailleurs, on nous bassine avec la pseudo-flotte de vaisseaux «fantômes» de Vladimir Poutine qui serait la pierre angulaire du contournement des sanctions et qui permettrait l’écoulement des hydrocarbures russes, de par le monde. Cette flotte serait constituée d’au moins mille navires. Rien que cela. C’est ce pétrole qui financerait l’effort de guerre russe, toujours selon Emmanuel Macron. Sauf que pour l’instant, on ne peut rien reprocher au tanker «Pushpa» si ce n’est de ne pas avoir répondu à l’adjonction d’un remorqueur de la marine française, alors qu’il se trouvait dans les eaux internationales.

Certes ce bâtiment a changé plusieurs fois de noms et de pavillons au cours de ses quelques décennies d’activités. Pour se nommer tantôt «Kiwala», «Pacific Apollo» ou «P. Fos».

C’est coutumier dans le transport maritime. Ces bâtiments changent régulièrement de propriétaire. Seule l’immatriculation IMO (International Maritime Organisation) demeure immuable.

En arraisonnant ce pétrolier dans les eaux internationales sans avoir un dossier d’investigation et de preuves plus costaud, l’État français se livre assurément à un acte de piraterie.

Et qu’en est-il de l’usage du pavillon de complaisance ou de nécessité comme aiment à l’appeler les maltais ?

C’est devenu la règle ! Plus de 80% du fret maritime y recourt, selon Guillaume Travers, économiste et spécialiste reconnu.

Les drapeaux du Bénin, du Libéria, du Gabon, de la Mongolie, des Îles Marchal pour ne mentionner que ceux-là sont utilisés. Pour des questions de fiscalité, en premier lieu. Et ensuite d’une réglementation générale plus souple voire totalement laxiste. Tant en matière de normes écologiques qu’en matière de conditions sociales pour les employés. C’est ce qui permet, par exemple, à la France de livrer des armes à Israël plus ou moins discrètement (1). Ou au géant français CMA CGM, troisième groupe de transport maritime mondial, de salarier ses marins philippins 3,25 euros l’heure pour des semaines de travail de soixante-cinq heures (2). On estime que ce groupe qui possède quelques 500 navires n’en a domicilié fiscalement que 5% dans l’Hexagone. On imagine assez bien dans quel abysse saute pieds joints le président Macron si il voit le péril russe derrière chaque pavillon de complaisance.

Notes:

  1. «Guerre à Gaza : la France a fourni en secret des équipements de mitrailleuses à Israël», Disclose, 25 mars 2024.
  2. «Transport maritime : un pavillon de complaisance Made in France», France 2, Compléments d’enquête, 7 avril 2022.

***

Le théâtre de Macron avec l’arraisonnement d’un pétrolier fait rire la presse britannique

L’opération française contre le pétrolier Boracay n’a servi qu’à occuper les écrans, rapporte le magazine britannique Spectator. Derrière l’image de fermeté mise en avant par Macron, l’Europe continue d’acheter massivement énergie et carburants russes.

Sous la plume du Spectator, la politique française prend des airs de mise en scène hollywoodienne : un vieux pétrolier, le Boracay, des commandos masqués lourdement armés, et un président français qui s’octroie volontiers le rôle principal. L’hebdomadaire britannique parle d’un remake de «Mission impossible», destiné à illustrer la fermeté d’Emmanuel Macron face à ce que Paris décrit comme la «flotte fantôme russe».

En réalité, l’opération n’a guère abouti. Deux jours après son arraisonnement, le Boracay reprenait paisiblement sa route vers l’Inde avec ses 100 000 tonnes de brut. Aucune arme, aucun drone n’ont été découverts à bord, et son capitaine n’a été poursuivi que pour refus d’obtempérer. Emmanuel Macron a néanmoins justifié cette action : «Nous avons décidé de passer un pas en allant vers des politiques d’entrave».

Le Spectator souligne que cette mise en scène contraste fortement avec les résultats concrets. L’arraisonnement du Boracay n’a entraîné ni saisie de cargaison ni révélation de réseaux occultes, mais seulement un court retard dans la traversée et une large couverture médiatique.

Le Spectator rappelle également que vendre du pétrole russe n’est pas illégal : la seule contrainte repose sur un plafond de prix fixé 15% en dessous du marché. Mais ce mécanisme est facilement contourné. Résultat : alors que Bruxelles proclame sa fermeté, les importations de gaz naturel liquéfié russe en Europe ont bondi de 25% en un an et le pétrole transporté par des navires comme le Boracay finit souvent dans les raffineries indiennes, dont les produits repartent ensuite vers l’Europe.

L’hebdomadaire cite aussi l’exemple de Lukoil, qui continue d’exploiter ses raffineries en Roumanie, aux Pays-Bas et en Bulgarie, en toute conformité juridique.

L’auteur de l’article note que la dépendance des carburants russes reste réelle : le gaz transite toujours par l’Ukraine et la Turquie, et les stations-service européennes sont quotidiennement alimentées en carburants issus, directement ou indirectement, du brut russe. Ce décalage entre le discours politique et la réalité économique explique, selon l’hebdomadaire, pourquoi l’épisode du Boracay est perçu outre-Manche comme une démonstration plus théâtrale que stratégique.

La réaction russe

Le 2 octobre, lors de la séance plénière du club Valdaï, Vladimir Poutine a dénoncé l’interception par la France d’un pétrolier en eaux internationales, qu’il a qualifiée d’acte de piraterie. Le Spectator a avoué que le président russe n’avait pas tort : l’affaire relevait plus du spectacle que de la stratégie. Vladimir Poutine a expliqué que le navire avait été arraisonné sans aucun fondement. Selon lui, les autorités françaises semblaient rechercher à bord des cargaisons militaires ou des drones, qui n’étaient pas présents et ne pouvaient pas l’être.

«Mais de quoi s’agit-il réellement ? Est-ce si important pour la France ? Oui, c’est important. Savez-vous pourquoi ? En raison de la situation politique difficile pour les dirigeants français. Parce qu’ils n’ont aucun autre moyen de détourner l’attention de la population, des citoyens français, des problèmes complexes et difficiles à résoudre au sein même de la République française», a-t-il estimé.

source : RT France


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