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Lundi, 22 Sept. 2025

Quand le lobby s’invite à l’Élysée

Auteur : E&R | Editeur : Walt | Lundi, 22 Sept. 2025 - 14h21

Pourquoi se gêner ? Avant, les relations entre la CJO (communauté juive organisée) et l’Élysée étaient empreintes de discrétion, de secret, et, disons-le tout net, d’un peu de honte. Car ça shuntait tous les principes républicains, dont le lobby se réclamait, et se réclame toujours : laïcité, république, valeurs, bla, bla.

Aujourd’hui, la transparence a gagné, ou alors le lobby se croit tout permis, notamment avec Macron. Pourtant, le Président a lancé une idée, une vieille lune, un marronnier, celui de la reconnaissance de l’État palestinien. Ou de ce qu’il en reste : Gaza est rasée, la Cisjordanie cisaillée.

Officiellement, Macron a donc invité 14 personnalités du monde juif pour parler conflit IP et, surtout, État palestinien, ce qui ne met pas ses invités en joie. On peut aussi imaginer que Macron s’est fait forcer la main, et que c’est lui l’invité. Mais n’envenimons pas le sujet, et étudions le casting royal.
On laisse Le Figaro faire l’article sur le dîner du 11 septembre 2025 dans le Salon des ambassadeurs de l’Élysée. On précise qu’on n’était pas au courant, et qu’à la lecture de ce compte-rendu, on est tombés de notre chaise à porteurs.

Ce repas, dont l’existence a été révélée par La Tribune Dimanche, est l’une des initiatives du président pour déminer et se justifier. Ce soir-là, flanqué de six conseillers, Emmanuel Macron laisse d’abord les convives s’exprimer. Rapidement, le philosophe Alain Finkielkraut vient en soutien de sa décision. Dans un violent réquisitoire contre Benyamin Netanyahou, l’académicien estime que cette reconnaissance est « le pire cadeau qu’on puisse faire au Hamas », quoi qu’en disent ses contempteurs, puisque la reconnaissance de deux États enterrerait mécaniquement la revendication du mouvement islamiste d’une Palestine « de la mer au Jourdain ». Assis en face du président, l’essayiste Denis Olivennes, patron du groupe de médias CMI France, souscrit plutôt au raisonnement, tandis que l’écrivain Pascal Bruckner fait observer qu’une telle reconnaissance n’atténuera en rien l’antisémitisme en France, au contraire.

L’air de rien, en surveillant les vigiles du Figaro du coin de l’œil, on envoie un autre pâté, ce qui nous évite un résumé bancal :

Bernard-Henri Lévy s’élève, lui, avec fougue contre cet acte. « C’est catastrophique pour la France, pour Israël et pour la paix, lance le philosophe. Cela ne fera qu’accroître l’aura du Hamas dans l’ensemble du peuple palestinien et dans la région. » Un avis plutôt partagé par l’ancien patron de Publicis Maurice Lévy et l’avocat Pierre-François Veil. À propos de la guerre à Gaza, un débat s’engage sur le terme de « génocide », globalement récusé par les convives, tandis qu’Emmanuel Macron se garde bien de prendre position. Surtout, plusieurs invités, comme l’historien Marc Knobel ou la réalisatrice Hanna Assouline, interpellent le président sur la montée de l’antisémitisme en France.

Le Président a l’habitude de jouer avec le robinet d’eau chaude et le robinet d’eau froide : même les Prominenten, pour reprendre la terminologie allemande, sont paumés. Joann Sfar, le propagandiste de l’israélisme de gauche, a refusé l’invite en arguant qu’il n’arrive pas à lire le Macron, et qu’il ne se sent pas représenter la communauté juive. Tiens, première nouvelle, tant le médiocre dessinateur se fait le chantre de la lutte contre l’antisémitisme dans le monde médiatico-culturel. On en oublie même qu’il est dessinateur, ce qui n’est pas une mauvaise chose.

Jamais contents, réclamant l’impossible, les invités sont globalement partis déçus de cette entrevue. On a gardé le pire pour la fin, avec les réactions du duo de choc Valls-Yadan. Vous n’allez pas être déçus.

Cette énième déclinaison du « en même temps » a détourné d’Emmanuel Macron nombre de personnes attachées à la sécurité d’Israël et à la lutte contre l’antisémitisme. Comme Caroline Yadan, députée de la 8e circonscription des Français de l’étranger – qui recouvre Israël – pourtant membre du parti présidentiel Renaissance. « Reconnaître un État sans conditions revient à consacrer le plus grand massacre antisémite du XXIe siècle comme son mythe fondateur, réprouve-t-elle. On a vraiment l’impression d’un discours déséquilibré. Les Juifs vivent un tsunami antisémite en France et sont abandonnés parce qu’il n’y a pas de sursaut étatique, alors que leur vie a changé depuis le 7 Octobre. » Manuel Valls, ministre sortant des Outre-mer, a tenté d’attirer l’attention d’Emmanuel Macron sur ce désarroi lors d’un Conseil des ministres fin juillet, comme l’a rapporté L’Opinion. L’occasion d’un débat entre les deux hommes sur le rapport de la communauté juive à l’universalisme.

L’universalisme, c’est le verre d’eau qui fait passer la pilule du génocide ? On apprend au bout de l’article que Meyer Habib a eu Macron quarante minutes au téléphone. Les parents de Lola ou de Thomas ont eu moins de chance. Et on ne parle pas des parents encore en vie des enfants palestiniens assassinés.

Dans la foulée de ce dîner très « petits meurtres entre amis », Le Figaro du 19 septembre nous apprend que seuls 29 % des juifs français soutiennent la proposition de Macron sur la Palestine (une reconnaissance sans conditions). Nous dirons qu’il s’agit majoritairement des juifs de gauche. Mais on apprend dès la ligne suivante que le sondage a été commandé par le CRIF, et là, on peut douter des chiffres. Yonathan Arfi a alors sorti son joker, un nouvel élément de langage :

« On voit maintenant un antisémitisme d’intimidation qui s’installe. Un Français sur cinq considère désormais justifié de prendre à partie des Français juifs en raison de leur soutien réel ou supposé au gouvernement israélien ».

On n’en est pas encore aux bombardements des quartiers juifs parisiens à coups de Rafale armés jusqu’aux dents, il faut raison garder. L’antisémitisme d’intimidation, c’est pour relancer la machine à inquiéter la communauté juive, qui ne risque rien en France. L’argument de Yoyo, c’est la montée de l’antisémitisme, selon lui, chez les jeunes. Il est vrai que par sentimentalisme, les jeunes Français, et surtout à gauche, ont choisi la Palestine contre Israël. Ils ont le cœur sur la main, cela se comprend. Mais ça ne fait pas d’eux des antisémites, à la limite, des anti-Netanyahou.

Cette prétendue haine d’Israël ne vient pas de nulle part : il suffit de regarder les images quotidiennes du massacres, auxquelles personne en bonne santé mentale ne peut s’habituer. Il est encore heureux que le rejet d’Israël n’atteigne pas 100 % ! Passons dans l’article sur les délires victimaires du Bureau national de vigilance contre l’antisémitisme (BNVCA), à les écouter – « des familles terrorisées, des citoyens doutant de leur avenir sur le sol français » – on croirait que les Français sont en train de faire subir aux juifs le même sort que l’armée israélienne inflige aux Palestiniens ! Le delirium victimaire atteint son apogée avec Didier Long, auteur de La Fin des juifs de France ?, qui estime que « 150 000 juifs, vivant directement au contact de populations arabo-musulmanes, sont en danger aujourd’hui en France ». Le Hamas, c’est bien connu, fait la loi dans les cités.

Il est indéniable que le sentiment anti-israélien est monté d’un cran en France, mais comment s’en étonner, quand on entend chaque jour les ministres de Netanyahou tenir des propos incendiaires et génocidaires ?


- Source : E&R

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