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Samedi, 03 Mai 2025

Qu’est-ce que l’IHRA, qui doit définir l’antisémitisme en France ?

Auteur : Éric Verhaeghe | Editeur : Walt | Vendredi, 02 Mai 2025 - 18h17

L’opération est excellemment montée ! Pour faire taire toute critique contre Israël en France, au nom de la lutte contre l’antisémitisme (voilà qui s’appelle une lutte communautaire pied à pied contre l’identité française encline à la liberté d’expression d’où qu’elle vienne !), les partisans de Nétanyahou tentent de faire adopter la définition de l’antisémitisme propagée par leur groupe, en une définition universelle. Problème : dans cette revendication communautariste extrême, toute critique contre Nétanyahou pourrait donner lieu à une peine de prison… Selon les critères de l’IHRA, dont nous vous dévoilons les contours aujourd’hui.

L’IHRA, ou Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (International Holocaust Remembrance Alliance), est une organisation intergouvernementale fondée en 1998, avec pour mission de promouvoir l’éducation, la mémoire et la recherche sur l’Holocauste, ainsi que de lutter contre l’antisémitisme. En 2025, elle compte 35 pays membres, dont Israël, qui joue un rôle central dans ses activités. Cette note explore en détail ce qu’est l’IHRA et examine ses liens avec Israël, en s’appuyant sur des informations disponibles en ligne et des analyses récentes.

Qu’est-ce que l’IHRA ?

L’IHRA a été initiée en 1998 par l’ancien Premier ministre suédois Göran Persson, avec pour objectif de développer l’éducation sur l’Holocauste à l’échelle mondiale. Elle regroupe des gouvernements et des experts pour renforcer et promouvoir ces domaines, en s’appuyant sur la Déclaration de Stockholm de 2000, qui constitue le fondement de ses activités. En 2025, l’organisation compte 35 États membres, deux pays de liaison, huit pays observateurs et huit partenaires internationaux permanents, tels que les Nations Unies et l’UNESCO.

Un élément clé de l’IHRA est sa définition de travail de l’antisémitisme, adoptée le 26 mai 2016 par consensus parmi ses 31 membres à l’époque. Cette définition, non contraignante, stipule : « L’antisémitisme est une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par une haine à leur égard. Les manifestations rhétoriques et physiques de l’antisémitisme visent des individus juifs ou non et/ou leurs biens, des institutions communautaires et des lieux de culte. » Elle est accompagnée de 11 exemples illustratifs, dont 7 concernent spécifiquement Israël, tels que « nier le droit du peuple juif à l’autodétermination, par exemple en affirmant que l’existence de l’État d’Israël est un projet raciste » ou « comparer les politiques israéliennes contemporaines à celles des nazis. » Ces exemples ont été largement adoptés par plus de 30 États, y compris Israël, et utilisés dans des contextes éducatifs, judiciaires et politiques.

Les liens entre l’IHRA et Israël

Les connexions entre l’IHRA et Israël sont multiples et structurelles, comme détaillé ci-dessous :

  1. Membre actif et fondateur : Israël est un membre fondateur de l’IHRA et participe activement à ses travaux. Il est représenté par des délégués tels que Sharon Rappaport et Iris Rosenberg, qui contribuent aux groupes de travail de l’organisation, notamment sur la recherche, l’éducation et les musées. La page officielle de l’IHRA sur Israël souligne que la Shoah est centrale à l’identité nationale israélienne, renforçant son engagement dans l’organisation.
  2. Définition de l’antisémitisme et implications pour Israël : La définition de l’antisémitisme de l’IHRA inclut des exemples qui touchent directement à Israël, tels que « l’antisémitisme peut se manifester par des attaques à l’encontre de l’État d’Israël lorsqu’il est perçu comme une collectivité juive. » Cependant, elle précise que « critiquer Israël comme on critiquerait tout autre État ne peut pas être considéré comme de l’antisémitisme. » Cette nuance a été critiquée par des organisations comme Human Rights Watch et Amnesty International, qui estiment que cette définition peut être utilisée pour restreindre la liberté d’expression et protéger Israël de critiques légitimes. Par exemple, en 2023, une coalition de plus de 100 organisations de la société civile a appelé les Nations Unies à rejeter cette définition, arguant qu’elle cible les activistes pour les droits des Palestiniens. D’un autre côté, des groupes juifs progressistes, comme ceux mentionnés dans The Times of Israël, s’opposent à son utilisation, craignant qu’elle ne refroidisse les critiques légitimes de la politique israélienne.
  3. Présidence en 2025 : En 2022, Israël a été élu pour présider l’IHRA en 2025, une année marquée par le 80e anniversaire de la libération d’Auschwitz et le 25e anniversaire de la fondation de l’IHRA. Cette décision, prise à l’unanimité lors de la session plénière annuelle de l’IHRA à Stockholm, reflète l’engagement d’Israël dans la préservation de la mémoire de l’Holocauste et la lutte contre l’antisémitisme. La présidence est partagée entre le ministère des Affaires étrangères israélien et Yad Vashem, renforçant le rôle d’Israël au sein de l’organisation. Cette position de leadership illustre un lien structurel significatif, comme rapporté dans Yad Vashem.

Controverses et perspectives

La relation entre l’IHRA et Israël est marquée par des controverses, notamment autour de la définition de l’antisémitisme. Des critiques, comme ceux de la Ligue des droits de l’homme en France (LDH), estiment que cette définition n’aura aucun effet positif dans la lutte contre l’antisémitisme et pourrait même avoir un effet négatif en limitant la liberté d’expression. Ken Stern, un rédacteur de la définition, a également critiqué son utilisation, la qualifiant d' »instrument grossier » pour étiqueter les critiques d’Israël comme antisémites, comme mentionné dans The Guardian. En revanche, l’IHRA maintient que sa définition ne vise pas à restreindre la critique légitime d’Israël, mais à clarifier les manifestations de l’antisémitisme.

En 2025, la présidence d’Israël à l’IHRA pourrait intensifier ces débats, alors que l’organisation continue de jouer un rôle clé dans la lutte contre l’antisémitisme et la promotion de la mémoire de l’Holocauste. Cette position pourrait également renforcer la coopération entre l’IHRA et Israël sur des initiatives éducatives et de recherche, tout en alimentant les discussions sur l’équilibre entre la lutte contre l’antisémitisme et la liberté d’expression.

Tableaux récapitulatifs

Voici un tableau récapitulatif des critiques et des positions sur la définition de l’IHRA:

Conclusion

En résumé, l’IHRA est une organisation internationale clé pour la mémoire de l’Holocauste, avec des liens structurels et opérationnels significatifs avec Israël, notamment via sa participation active, sa définition de l’antisémitisme et sa présidence en 2025. Ces liens sont cependant controversés, reflétant des tensions entre la lutte contre l’antisémitisme et la liberté d’expression, en particulier concernant les critiques d’Israël.


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