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L’Organisation pour l’Interdiction des Armes Chimiques est devenue un outil du jeu géopolitique mené par les USA en Syrie

Auteur : Dr Bachar al-Jaafari | Editeur : Walt | Mercredi, 16 Déc. 2020 - 07h14

L’organe de presse de l’ONU en langue française a intitulé son compte rendu de la réunion du Conseil de sécurité du 11 décembre courant : [Vifs échanges au Conseil de sécurité ?sur l’utilisation présumée d’armes chimiques en Syrie et le rôle de l’OIAC]. 

En effet, le lecteur pourra mesurer le ton de la rhétorique catégoriquement accusatoire de tous les intervenants qui prétendent se soucier du sort du peuple syrien en continuant de l’étrangler par toutes sortes de sanctions inhumaines. Il pourra également constater que d’autres intervenants considèrent que le Directeur général de l’Organisation pour l’Interdiction des Armes Chimiques [OIAC], M. Fernando Arias, et Mme Izumi Nakamitsu, Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, jouent le jeu des États engagés dans la Coalition internationale menée pas les États-Unis contre la Syrie. 

Cependant, chacun des agresseurs a eu droit à une réponse personnalisée du désormais Vice-ministre syrien des Affaires étrangères et des Expatriés, le Docteur Bachar al-Jaafari. À notre connaissance, ses propos n’ont pas été démentis jusqu’ici. [NdT]. 

***

DE L’OIAC DEVENUE UN OUTIL DU JEU GÉOPOLITIQUE MENÉ PAR LES USA 

Monsieur le Président, 

Je vous félicite ainsi que votre pays ami, l’Afrique du Sud, pour votre présidence du Conseil de sécurité ce mois-ci. Et, en toute confiance dans l’efficacité de votre gestion de ses travaux, je vous remercie pour la tenue de la session ouverte d’aujourd’hui. 

J’ai écouté très attentivement les déclarations de Mesdames et Messieurs les délégués des États Membres. Et, alors que je redis la profonde gratitude de mon pays à l’égard des États ayant témoigné de leur attachement aux principes du droit international ainsi qu’aux dispositions de la Charte de l’ONU et condamné l’usage des armes chimiques, et autres armes de destruction massive, en tout temps, tout lieu et toutes circonstances, je tiens à affirmer que s’agissant du « dossier chimique » concernant mon pays, l’OIAC qui est une organisation technique aux nobles objectifs est devenue un outil du jeu géopolitique mené par les États-Unis et leurs alliés. 

En effet, au lieu de veiller au respect des dispositions de la Convention sur l’Interdiction des Armes Chimiques [CIAC] loin de toute politisation et polarisation, l’OIAC s’est transformée en outil destiné à faire pression et à cibler mon pays, un État faisant partie de cette convention, afin de servir des agendas hostiles à l’État syrien. 

DU REFUS D’IDENTIFICATION DES AUTEURS D’ATTAQUES CHIMIQUES EN DÉPIT DES TÉMOIGNAGES ISSUS DE L’OIAC

Ceci est dangereux, inquiétant, sans précédent et menace l’avenir de l’OIAC, car la poursuite de ce jeu déloyal pourrait convaincre nombre de pays de l’inutilité de leur adhésion à cette organisation. Ce qui n’est pas dans l’intérêt de M. Fernando Arias, puisque l’Histoire retiendra que sous sa direction l’OIAC s’est transformée en une arme politique et d’extorsions, contrairement à d’autres brillantes expériences menées, dans ce même domaine, par les inspecteurs Hans Blix et Scott Ritter lorsqu’ils ont refusé de cautionner le jeu des États-Unis dans la destruction de l’Irak, et celles menées par l’inspecteur Ian Henderson, M. José Boustani l’ancien directeur de l’OIAC, le site Grayzone et bien d’autres qui refusent la politisation du dossier chimique au sein de l’OIAC et son exploitation contre la Syrie et l’État syrien. 

Monsieur Arias a déclaré que le Secrétariat général de l’OIAC avait été mandaté depuis 2018 pour déterminer l’identité des individus ayant utilisé des armes chimiques. Mais qu’en est-il de l’enquête concernant l’utilisation d’armes chimiques à Khan al-Assal en mars 2013 ? À l’époque, Monsieur Arias, j’avais sollicité l’ancien secrétaire général Ban Ki-moon afin qu’il aide le Gouvernement syrien à déterminer l’identité de ceux qui avaient utilisé « le chimique » à Khan al-Assal. Il m’avait demandé d’attendre quelques heures afin de consulter les États occidentaux au sein du Conseil de sécurité, pour finir par me dire qu’il ne pouvait pas aider à déterminer l’identité des auteurs, mais qu’en revanche il enverrait le Docteur Ake Sellstrom pour confirmer ou infirmer l’usage d’armes chimiques. 

Ce qui signifie que dès 2013, ces États étaient contre la révélation de l’identité des auteurs de la première attaque chimique en Syrie. Pourquoi ? Parce qu’ils savaient que les organisations terroristes avaient amené le produit chimique de Libye par le biais des services de renseignement turcs et du terroriste Haïtham al-Qassar, lequel s’est chargé de le transporter à bord d’un avion civil libyen vers Istanbul, avant de l’acheminer par voie terrestre vers la région d’Alep. C’est ce que tout le monde doit savoir. 

J’ai également entendu Monsieur Arias déclarer, ainsi que certains représentants de pays occidentaux, que suite à la dernière visite de l’« Équipe d’évaluation des déclarations » de l’OIAC à Damas, 3 questions liées à la déclaration initiale de la Syrie ont été réglées, tandis que 19 questions sont restées en suspens. Est-ce là l’essentiel du travail de l’OIAC ? Ou bien est-ce de reconnaître ce que son secrétariat technique a lui même reconnu, dans des documents certifiés, quant à la destruction de toutes les armes chimiques et des installations destinées à leur fabrication ?

DE LA CENSURE DES RAPPORTS ÉMANANT DES INSPECTEURS DE L’OIAC 

Ce sont là des informations issues de votre propre organisation Monsieur Arias. C’est ce qui est de première importance, avec en deuxième lieu le rapport final présenté devant le Conseil de sécurité en 2014 par Madame Sigrid Kaag, Coordinatrice de la mission conjointe chargée du démantèlement des armes chimiques de la Syrie, laquelle avait affirmé que la Syrie avait respecté tous ses engagements et que son stock de produits chimiques avait été entièrement détruit à bord du cargo américain Ray et de deux autres cargos norvégiens. C’est sur ces données que nous devrions nous concentrer au lieu de réunir 90 fois le Conseil de sécurité depuis 2013, pour entendre répéter les mêmes propos et les mêmes mensonges. 

90 réunions du Conseil de sécurité tout au long des sept dernières années, durant lesquelles nous avons adressé 210 lettres officielles pleines d’informations sur la possession et l’usage d’armes chimiques par les terroristes, sans que Madame Nakamitsu ne trouve l’occasion d’informer les membres de ce Conseil sur quelques-unes de ces lettres, sans que Monsieur Arias ne trouve l’occasion d’informer les membres de l’OIAC ! Des lettres officielles inhabituelles vu qu’elles contiennent des informations sur des experts français, américains et belges ayant transporté « le chimique » vers le nord de la Syrie et certaines régions d’Idleb, pour ensuite accuser l’Armée syrienne de l’avoir utilisé. 

DE CEUX QUI MENTENT ET CROIENT EN LEURS MENSONGES

Un personnage de la littérature arabe nommé Djoha, lequel pourrait être comparé au « wise fool » ou le sage insensé de Shakespeare, est connu pour mentir puis de croire à ses mensonges, comme c’est le cas de certains États Membres qui insistent sur la diffusion de mensonges au sein de ce Conseil, dont ce n’est ni le lieu ni la fonction. En effet, tout le monde sait que : 

  • les justifications invoquées par les États-Unis pour envahir le Vietnam étaient des mensonges, 
  • les justifications invoquées par les États-Unis pour envahir la Grenade étaient des mensonges,
  • les justifications invoquées par les États-Unis pour envahir l’Irak étaient des mensonges,
  • les justifications invoquées pour la Libye étaient des mensonges, 
  • les justifications actuellement invoquées pour envahir certaines régions de mon pays sont des mensonges. 

Tel est le problème de fond, non celui de 19 questions restées en suspens, lesquelles pourraient être réglées avec le Gouvernement syrien dans le respect des règles de la courtoisie, car nous faisons partie de cette organisation et nous n’avons aucun problème de dialogue avec elle ; un dialogue censé rester honnête, fondé sur les faits et la logique, non sur les accusations, la désinformation et les mensonges. 

DE CEUX QUI REFUSENT DE CLORE LE DOSSIER CHIMIQUE POUR CONTINUER À L’EXPLOITER CONTRE LA SYRIE

Depuis son adhésion à la CIAC en 2013, la Syrie a travaillé dur, en toute sincérité et transparence, pour s’acquitter de toutes ses obligations. En dépit du calendrier extrêmement rigide de l’OIAC et malgré les graves difficultés que traverse le pays, elle a accompli tout ce qui était exigé du fait de cette adhésion et a pleinement coopéré avec le secrétariat technique de l’OIAC et ses différentes équipes, de l’aveu même de l’organisation et de son Directeur général ici présent. 

Ainsi, il y a quelques jours, nous avons fourni toutes les facilités et la coopération nécessaire à l’« Équipe d’évaluation de la déclaration » rendue en Syrie, ainsi qu’à une autre équipe qui nous a quittés le 24 du mois dernier. Deux équipes nous ont donc rendu visite en un seul mois. Suite à cela le Secrétariat général de l’OIAC a reconnu dans des documents certifiés la destruction totale de toutes les armes chimiques et des installations de leur production, comme je viens de le dire et comme en avait témoigné Madame Sigrid Kaag, actuellement ministre du gouvernement néerlandais, devant le Conseil de sécurité et l’OIAC en 2014.

La Syrie a donc respecté ses engagements. En revanche, les pays occidentaux dirigés par les États-Unis ont rompu les leurs dans le but de concrétiser leurs agendas politiques en utilisant l’OIAC d’une manière qui leur éviterait de renouveler le fiasco de leurs mensonges autour de l’Irak. Elle réaffirme ne pas avoir utilisé d’armes chimiques et avoir pleinement coopéré avec l’OIAC, son secrétariat et ses diverses équipes, afin de régler l’ensemble des questions restées en suspens, de telle sorte que ce dossier du chimique soit, au plus tôt, définitivement clos et soustrait aux jeux politiques et aux organes de la désinformation. 

Vers la mi-novembre la Syrie a soumis au secrétariat technique de l’OIAC son 84ème rapport pour la période allant du 16 octobre au 15 novembre de cette année 2020, en confirmant sa volonté de poursuivre sa coopération, conformément à ce qui avait été convenu. C’est dans cet esprit qu’elle a accueilli le septième round de l’« Équipe d’inspection » des Centres d’études et de recherches scientifiques de Barzé et de Jamraya, ainsi que l’équipe chargée de retirer les dispositifs de surveillance à distance de quatre installations, comme décidé par le Conseil exécutif de l’OIAC le 24 juillet 2014. Suite à cette dernière visite et au cours de la réunion de clôture de sa mission, le chef de l’équipe d’inspection a remercié la Syrie pour son soutien et sa coopération et a reconnu que son équipe avait pu se rendre là où elle l’avait demandé. 

C’est ce que les membres de ce conseil auraient dû entendre de la bouche de Monsieur Arias et de Madame Nakamitsu, en sachant que les centres de recherches de Barzé et de Jamraya ont disparu de la surface de la terre depuis que l’agression américano-israélienne les a complètement détruits. Autrement dit, vous êtes à la recherche de Godot ! 

En dépit de cette indéniable coopération avec l’OIAC, certains pays occidentaux continuent de semer le doute sur la coopération et les déclarations syriennes soumises à son secrétariat technique, en négligeant délibérément les progrès accomplis jusqu’ici. Pourquoi ? Pour ne pas clore le dossier chimique et faire chanter l’État syrien.

DE L’OBSTINATION DE LA FRANCE À SUIVRE LES DIRECTIVES DES USA

Dans ce contexte, le Gouvernement de mon pays exprime ses regrets devant l’absence d’objectivité et de professionnalisme de certains États Membres du Conseil de sécurité dans leur façon de traiter ce dossier, et devant leur non-respect des règles et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies au cours de toutes les délibérations mensuelles concernant la mise en œuvre de la résolution 2118 (2013). 

À titre d’exemple, dans le cadre du jeu de rôle entre les États-Unis et certains pays occidentaux, la France a officiellement présenté au Secrétariat technique de l’OIAC un projet de résolution américain, lequel avait été secrètement distribué par Washington à ses missions accréditées à La Haye…Monsieur Arias !

DU SCANDALE DE L’IMPLICATION DES PAYS-BAS DANS LE SOUTIEN DES TERRORISTES 

De leur côté, les Pays-Bas ont entrepris de présenter à l’Assemblée générale un projet de résolution politisé par excellence et intitulé : « Coopération entre l’ONU et l’OIAC ». Un projet dont 4 paragraphes sur neuf concernent particulièrement mon pays. Un projet comme tant d’autres projets censés être soumis à la Sixième commission de l’Assemblée générale pour adoption. Pourquoi concevoir un tel projet ? Question que je laisse à votre jugement. 

Ici, il nous faut rappeler devant l’opinion publique internationale le scandale de l’implication des Pays-Bas dans le soutien des organisations terroristes en Syrie ; le Premier-ministre néerlandais Mark Rutte ayant récemment avoué qu’il était personnellement intervenu pour bloquer des enquêtes parlementaires sur les millions de dollars fournis par son gouvernement à environ 22 groupes terroristes sévissant dans mon pays, dont « Al-Jabhat al-chamiya » [le front du Levant] classé en tant qu’organisation terroriste par les institutions néerlandaises elles-mêmes. 

Par ailleurs, le ministre néerlandais des Affaires étrangères, Steve Block, avait précédemment appelé à l’arrêt des enquêtes, considérant qu’elles créeraient de sérieux problèmes pour certaines personnalités et embarrasseraient nécessairement certains alliés. 

Tel est donc le rôle de l’OTAN, en sachant que les Néerlandais sont, après les Belges, au deuxième rang des nationalités ayant compté des centaines de terroristes partis se battre aux côtés d’organisations terroristes en Syrie et en Irak ; le nombre total de terroristes de nationalités européennes rendus chez nous étant estimé aux environs de 14 000.  

En outre, l’agence de renseignement néerlandaise a déclaré en février 2017 qu’elle suivait des dizaines d’enfants néerlandais rendus, avec ou sans leur famille, dans les zones de propagation de Daech en Syrie et en Irak où ils auraient bénéficié d’une formation militaire aux mains de l’organisation terroriste. 

Et la Fondation de radio-télévision néerlandaise [NOS] a confirmé en septembre 2018 le soutien du gouvernement néerlandais à l’organisation terroriste « Al-Jabhat al-chamiya » précitée, laquelle aurait bénéficié de ses services logistiques entre 2015 et 2018. 

Ce qui témoigne d’une hypocrisie scandaleuse et suggère que c’est par crainte du scandale que les Pays-Bas ont lancé dernièrement toutes sortes de mensonges sur la Syrie et se sont préparés à soumettre à l’Assemblée générale le projet de résolution précité visant particulièrement la Syrie. 

DE L’ACCUEIL DU CHEF DE L’ORGANISATION TERRORISTE « CASQUES BLANCS » PAR L’ALLEMAGNE

Il n’y a plus de quoi s’étonner, Monsieur le Président, du fait que les États occidentaux qui clament leur prétendu souci humanitaire à l’égard du peuple syrien continuent de soutenir et de protéger les organisations terroristes responsables de ses souffrances. 

Ainsi, le quotidien allemand « Der Spiegel » a révélé le transfert du chef de l’organisation terroriste des prétendus secouristes désignés par les « Casques blancs », Khaled al-Saleh, accompagné de sa famille, de Jordanie vers l’Allemagne où il a été accueilli avec tous les honneurs par le gouvernement allemand. Et ce, alors qu’il y a deux et à l’occasion de l’examen d’une demande de séjour le concernant, l’Office fédéral de protection de la constitution avait constaté ses convictions radicales, les indices trouvés dans son téléphone ne laissant aucun doute sur ses liens avec des terroristes et sur le danger qu’il représente pour la sécurité nationale allemande. Ce qui n’a pas empêché le ministère allemand des Affaires étrangères de l’accueillir et d’ignorer les avertissements à son sujet, les États-Unis ayant refusé de le recevoir et la Jordanie ayant refusé de le garder. 

DE LA NÉCESSIT?É D’ÉVITER LA POLITISATION DE L’OIAC

Monsieur le Président, 

La Syrie demande aux États Membres de l’OIAC de refuser sa politisation et de remédier aux graves défauts ayant entaché son travail et qui pourraient saper sa réputation et sa crédibilité. 

L’arme chimique est certes une arme sale, au même titre que les armes biologiques ou nucléaires. Mais, il nous faut souligner que cette arme porte certains représentants d’États occidentaux à en parler comme d’une arme discriminante qui ne tue que des enfants ! Pourquoi n’atteint-elle que les enfants ? Pourquoi n’atteint-elle pas les terroristes ? Les Terroristes auraient-ils été vaccinés contre le « chimique » ? Questions que je laisse encore une fois à votre jugement. 

Merci Monsieur le Président.

Dr Bachar al-Jaafari

Traduction de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal pour Mondialisation.ca


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