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Vendredi, 03 Mai 2024

Le piège se referme sur les médecins...

Auteur : Dr. Jacques Michel Lacroix | Editeur : Walt | Vendredi, 20 Juin 2014 - 10h42

L’annonce, par le gouvernement, d’instaurer le tiers payant généralisé chez le médecin peut apparaître comme une avancée sociale mais c’est un leurre.

Ce n’est que l’aboutissement d’un long processus visant, depuis longtemps, à mettre les médecins sous la tutelle de la Scurité sociale. Processus amorcé il y a déjà de nombreuses années par l’instauration de primes pour récompenser ceux qui atteignaient les objectifs fixés par la caisse d’assurance maladie, ou de sanctions pour ceux qui déviaient trop de la ligne fixée par les technocrates de la caisse.

Les médecins militaires, bien qu’exerçant dans un cadre très restrictif, ou les médecins hospitaliers ont su faire respecter par leurs employeurs un espace de libre pratique qui va maintenant cruellement faire défaut à ce qu’on n’osera peut-être plus désormais appeler libéraux.

Ceux-ci seront soumis pieds et poings liés à l’organisme payeur, se devant d’appliquer ce que la caisse attend d’eux, et non pas ce que le malade leur demande.

Il y aura entre les caisses et les médecins un lien de subordination identique à celui qui existe entre l’employeur et l’employé, mais sans contrat de travail, donc à sens unique, et soumis au pouvoir léonin des caisses. Elles seront chargées de distribuer la paye selon leur bon vouloir, en fonction des bons points ou des mauvaises notes qu’aura accumulés le praticien. Elles pourront désormais facilement refuser le remboursement d’un acte qui ne s’inscrit pas dans un protocole de soin validé par ses experts, ou parce que la prescription ne correspond pas à ses recommandations.

Pour éviter ce manque à gagner, il est probable que les médecins appliqueront à la lettre les consignes. Il en sera fini de leur liberté et de celle des malades. La pratique médicale sera enfin formatée !

Que dire aussi des dépenses de santé qui vont mathématiquement augmenter. Certains malades consulteront plus qu’ils ne le faisaient, et les praticiens factureront (à juste titre) deux ou trois actes lorsqu’ils verront deux ou trois enfants au cours de la même consultation, alors que la plupart du temps (surtout lors de consultation rapide) ils n’en faisaient payer qu’une seule. Augmentation modérée, il est vrai, car la part que représente le remboursement des actes médicaux est relativement faible dans le budget de la sécurité sociale.

Le seul point positif de cette annonce, c’est la possibilité de faire bénéficier la classe moyenne des avantages que possédaient déjà les classes sociales les plus défavorisées ou les plus aisées. Pour les plus aisés, faire l’avance d’une consultation ne représentait pas une gêne particulière, et pour les plus défavorisés, l’obtention de la CMU (couverture médicale universelle) leur permettait déjà de bénéficier du tiers payant à tous les niveaux.

Au cours de ma carrière, je me suis toujours efforcé de faire en sorte que le lien d’argent qui lie le médecin au malade ne soit pas une gêne dans notre relation. Je pense que beaucoup de mes confrères font de même. Jusqu’à présent, le paiement à l’acte n’était sans doute pas la meilleure, mais c’était la moins mauvaise des solutions. On pouvait imaginer d’autres systèmes de rémunération des médecins afin de libérer le malade de cette contrainte pécuniaire, mais la solution qu’on nous propose, sous couvert d’avancée sociale, est sûrement la pire de toutes.


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