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Armée française, où est passé ton argent ?

Auteur : Alexandre Artamonov | Editeur : Walt | Samedi, 31 Mai 2014 - 14h29

Les généraux français ont protesté contre les nouvelles coupures drastiques du budget militaire… Du jamais vu en France ! Le général Jean du Verdier de l’armée de l’air nous commente cette réaction insolite de ses compagnons d’armes.

Voix de la Russie. Le très récemment nommé Pierre de Villiers et les 3 généraux aux commandes de l’armée de l’air, de terre et de la marine, ont refusé d’écouter leur tutelle de Bercy qui leur a recommandé de «raboter» le budget de la défense pour satisfaire aux besoins de la haute finance. C’est en fait du jamais vu, un cas de rébellion de la part des officiers supérieurs de l’armée française. Qu’en dites-vous, mon général ?

Général Jean du Verdier. C’est un cas rarissime où les 4 généraux du rang le plus élevé parce que ce sont les 4 chefs d’état-major des armées qui ont mis le président de la République en demeure de tenir sa parole quant au budget. Ils ont mis leurs étoiles sur la table en disant : «Vous nous avez promis 4 Milliards, vous nous en enlevez 2 – c’est impossible !» Impossible de tout remettre en question. Ceci dit les 2 Milliards ce n’est pas grand’chose pour la France ! On les trouverait facilement dans d’autres Ministères. Il faut voir que c’est quelque chose de parfaitement différent par rapport à ce qui se passerait dans un autre Ministère. Dans l’Education Nationale, on aurait le personnel qui se mettrait en grève ! Mais le militaire, lui, ne se met pas en grève. Le personnel de l’Education Nationale ne risque rien. Alors que nos 4 généraux risquent leur carrière qui se retrouve en voie de perdition. C’est qu’en fin de carrière, les généraux qui ont bien fait leur travail, on les recase, on leur trouve une place de conseiller d’Etat ou de l’Ambassadeur ; Et ceux-là ils peuvent faire une croix dessus. Il me semble que leur homologue se laissera peut-être convaincre par nos généraux parce qu’à l’inverse de ce que disent le premier ministre et le ministre des finances, cela revêt aussi une importance internationale. Parce qu’économiquement parlant la France ne fait plus le poids contre l’Allemagne, mais elle a encore un rôle à jouer au plan international. Ce rôle est représenté par son armée qui, bien que réduite à sa plus simple expression, est encore capable d’intervenir sur la scène, comme l’Afrique nous l’avait si bien démontré. Je parle des opérations qu’elle a menées au Sahara et qu’elle mène à l’heure actuelle en République Centre-Africaine.

Donc cette intervention des 4 généraux est certainement une manifestation importante des malaises au sein de l’armée. Mais à mon avis, ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Le malaise va beaucoup plus loin, bien au-delà de cette question de budget !

On a vécu en France, depuis de nombreuses années, sous la loi de 1982 et le rapport Bouchard après la désastreuse guerre de 70 on s’est rendu compte que l’armée n’a pas bien rempli sa tâche. Elle se fit réorganiser suivant les 2 principes : le principe de la primauté du commandement sur le service et le principe de la permanence de l’organisation tant en temps de paix qu’en temps de guerre. Et on avait donné au sommet les moyens d’exécuter la totalité de leur mission. Les armées ont reçu le nécessaire pour organiser leur intendance : pour construire et s’habiller, pour se fournir en matériel. L’armée avait sa justice, mais c’est M. Mitterrand qui la lui avait enlevé en 1981 et sont apparus à ce moment-là tous les problèmes de la judiciarisation de l’action militaire. On lui a interdit de faire un retour d’expérience honnête parce qu’il est devenu dangereux de dire ce qui n’allait pas… On lui a enlevé la gendarmerie. C’est Sarkozy qui l’a fait ! Elle a encore ses aumôniers, mais on lui a enlevé ses chapelles ! Alors tous les grands principes ont conduit à cet arrachage des feuilles de l’artichaut et grosso modo, à chaque fois que l’on estime que telle tâche peut être faite par une entreprise civile, on la confie à une entreprise civile et on l’enlève à l’armée.

Le deuxième principe est celui de la mutualisation des soutiens. Ce qui veut dire faire des soutiens qui soient communs aux différentes armées et qui de cette façon échappent au commandement.

Alors peu à peu en la dépouillant de tout au profit de l’administration et des entreprises civiles, on pensait réaliser des économies. Mais ces économies n’ont pas été efficaces et on a assisté à une certaine catastrophe.

J’ai été 35 ans dans l’armée de l’air. Je n’ai jamais eu aucun problème avec ma solde et le moindre retard pour son versement ! Depuis deux ans les soldes ne sont plus versées que de façon très aléatoire et on a été obligé de tout refaire à zéro. Cette mutualisation que l’on avait confiée à des entreprises civiles a été un échec total.

J’avais aussi constaté une chose : à l’époque où nous avions des messes, dans mon cas c’était un mess gastronomique et tout le monde était heureux d’être invité à mon mess ! Et maintenant que c’est différent les gens se plaignent, mais ça ne coûte pas moins cher ! Donc il n’y a aucun intérêt.

Autre élément de cette externalisation, c’est la perte d’éléments militaires au profit des civils. Alors un jour on aura besoin d’aller chercher le cuisinier pour assurer le maintien de l’ordre dans une banlieue troublée parce qu’on aura de moins en moins d’hommes disponibles. En Algérie, on a eu besoin très rapidement de beaucoup de personnel pour assurer le maintien d’ordre… Qu’est-ce qu’on a fait dans l’armée de l’air où l’on était ? On a pris ce qu’on appelait les paillots, c’est-à-dire les administratifs, les jardiniers et tous les gens des tâches annexes et on a créé des détachements qui en attendant l’arrivée d’autres troupes ont pu assurer le maintien de l’ordre.

En externalisant on s’est débarrassé de tout ce personnel militaire qui ne constitue peut-être pas un personnel très qualifié, mais qui serait fort utile si un jour on avait besoin de quadriller une certaine partie de notre territoire.

Commentaire de l’Auteur. L’armée française ne mange plus à sa faim. Elle n’est ni bien payée ni bien entretenue. En plus, on lui a fait perdre tout jusqu’à l’estime aux yeux d’une population qui lui est de plus en plus hostile parce que d’origine souvent étrangère. La démilitarisation de la France ressort de façon on ne peut plus évidente lors de la Fête du 8 mai où il n’y a personne sur les Champs.

Cette perte de l’esprit belliqueux de toute une nation est mortelle pour la survie d’un peuple que l’on soumet à une euthanasie forcée à vif sans même l’anesthésier. Les paillettes et feux d’artifice pour amuser les touristes n’impressionnent guère les ennemis de la France qui l’endorment de plus en plus. Les Américains, eux, veulent priver le berceau de la civilisation européenne de toute défense, de tout sérieux qui saurait redorer le blason terni de la Défense Nationale. Mais Washington a beaucoup de respect pour sa propre armée et ses traditions. Là-bas, de l’autre côté de l’Atlantique, ils ont pleinement conscience de ce que l’armée représente à titre d’une machine à assimiler l’immigration et tenir en respect les ennemis de leur peuple.

De son côté, la Russie a d’abord adopté la même trajectoire que la France avant de reconstruire sa nouvelle identité autour du noyau dur de la Défense. Poutine a rendu à l’armée des soldes très élevées (jusqu’à 4.000 euros net pour un lieutenant-colonel plus l’offre d’un logement gratuit après la fin du service actif pour tout militaire sans compter l’alimentation gratuite et l’uniforme donné). Le prestige du métier du militaire a permis aux jeunes gens des milieux pas très élevés d’avoir accès à une vie digne et par conséquent, a contribué à l’amélioration de la démographie avec les éléments nationaux et pas grâce à une population d’emprunt venue d’autres pays. Tout n’est pas idéal mais l’esprit, la religion et les traditions y sont déjà.

Peuplée en très grande partie par les familles des anciens militaires russes et soviétiques, la Crimée a servi de bel exemple de ce que la résistance d’un peuple en armes peut donner à son pays d’origine. La Russie ne se pense pas sans son armée et sans ses traditions guerrières. Alors peut-être que la France saura mettre fin à cette folie autodestructrice qui la prive de son système immunitaire que sont les militaires pour une société.


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