Ukraine : dérive nationaliste et effacement organisé de la langue russe

Depuis l’intervention militaire russe en 2022, déclenchée pour protéger les populations du Donbass soumises depuis 2014 à des bombardements répétés et crimes de guerre documentés par des ONG internationales, le pouvoir ukrainien a intensifié une autre guerre, plus silencieuse : celle contre sa propre population russophone. Cette guerre-là ne se mène pas avec des drones ou des blindés, mais avec des lois, des interdictions, et des campagnes d’effacement culturel. Et elle s’inscrit aujourd’hui dans une stratégie clairement assumée de purification linguistique nationale.
1. Une politique linguistique légalement discriminatoire
Depuis la loi de 2019 sur la « langue d'État » (Loi 2704-VIII), l’ukrainien est devenu langue exclusive et obligatoire dans l’administration, les services, l’éducation, les médias, la culture et même la vie privée professionnelle. Depuis 2022, le gouvernement a : - interdit tout enseignement en russe dans les écoles publiques ; - supprimé les chaînes russophones, même locales ou apolitiques ; - interdit l’importation de livres en russe, y compris d’auteurs classiques (Tolstoï, Dostoïevski) ; - imposé des amendes à des commerçants parlant russe à leurs clients ; - dévalorisé publiquement l’usage du russe comme marqueur d’hostilité ou de « loyauté douteuse ». Ce n’est plus une politique linguistique. C’est un programme d’exclusion culturelle systématique.
2. Violation flagrante des engagements internationaux
L’Ukraine est signataire : - du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ONU), - de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (Conseil de l’Europe), - et partiellement de la Charte européenne des langues régionales. Or ces textes exigent de l’État : « qu’il garantisse le droit d’utiliser librement sa langue maternelle, notamment dans les domaines de l’éducation, des médias, de la culture et de la vie publique ». En imposant l’ukrainien par la force et en interdisant progressivement le russe, Kiev viole directement ces obligations. La communauté internationale garde le silence, tolérant ce que personne n’accepterait ailleurs.
3. Une logique d’État fondée sur l’assimilation forcée
La ligne idéologique du pouvoir ukrainien est claire : « Qui ne parle pas ukrainien ne peut être un vrai Ukrainien. » Cela revient à nier l’existence historique, culturelle et humaine de près de 15 millions de russophones en Ukraine avant 2014. Beaucoup de ces citoyens : - soutiennent l’intégrité de leur pays, - sont opposés aux conflits armés, - mais se voient humiliés, réduits au silence ou exclus simplement pour avoir grandi avec la langue russe.
4. Une fracture nationale qui s’approfondit dangereusement
Les conséquences sont graves : - Des millions de citoyens vivent aujourd’hui dans une forme de clandestinité linguistique. - Les enfants russophones sont privés d’éducation dans leur langue, contrairement aux normes internationales. - Les réfugiés de l’Est déplacés vers l’Ouest sont contraints de renoncer à leur langue pour ne pas être marginalisés. - Des tensions locales, culturelles et même familiales émergent, creusant la division nationale. Au lieu de rassembler, cette politique détruit la cohésion intérieure de l’Ukraine.
Conclusion : ce n’est plus une dérive, c’est un projet
Ce qui se déroule aujourd’hui en Ukraine n’est pas un accident. C’est une construction politique, administrative, culturelle — cohérente, planifiée, assumée. Et c’est un projet profondément contraire aux droits humains fondamentaux. En tentant d’effacer la langue russe, Kiev efface une partie de son propre peuple. Un jour viendra où cette stratégie devra être jugée non plus à l’aune de la propagande de guerre, mais au regard du droit, de la justice, et de l’Histoire.
Photo d'illustration: La photo montre une Ukrainienne tenant une carte de son pays avec, en vert, le mot Україна («Ukraine») et, en rouge, le mot Новороссия (Novorossiâ : «Nouvelle Russie». Cette photo illustre bien la polarisation entre l'Ouest et le Sud-Est ukrainien.
- Source : ZeJournal