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Le point de vue du Guardian sur l’anti-populisme de Macron : la rhétorique ne suffit pas

Auteur : The Guardian (Royaume-Uni) | Editeur : Walt | Dimanche, 07 Oct. 2018 - 17h19

L’ambition du président français de mener une lutte mondiale contre le nationalisme et la xénophobie est ébranlée par son bilan national.

L’objectif d’Emmanuel Macron – faire grosse impression aux Nations Unies cette semaine – a été facilité par le fait qu’il intervenait après Trump. La défense passionnée, par le président français, de la coopération multilatérale fondée sur les droits de l’homme a été une charge contre l’unilatéralisme emphatique de son homologue américain. Plus tôt dans la journée, la dénonciation du « mondialisme » par M. Trump avait reçu un accueil glacial.

L’internationalisme ardent est le style préféré de M. Macron, et il le porte bien. Le discours électoral qui lui a permis de battre en 2017 Marine Le Pen, du Front National de l’extrême droite reposait en partie sur la défense du projet européen. Il se considère comme une figure de proue de la lutte contre les populistes à l’échelle du continent et espère mettre sur pied une coalition « progressiste » au Parlement européen, dont l’élection est prévue en mai prochain. A l’ONU, il a porté son message au niveau mondial, appelant à un renouveau de la gouvernance mondiale – « un nouvel ordre mondial à visage humain ».

Avec M. Trump à la Maison-Blanche, il ne fait aucun doute que la démocratie libérale a besoin de champions mondiaux. Et avec Angela Merkel, dans sa 13eannée à la chancellerie allemande et enlisée dans une coalition houleuse, il y a une place à prendre pour un leadership européen dynamique. Le problème qui se pose à M. Macron, lorsqu’il aspire à assumer ce rôle, est le fossé qui sépare son aisance verbale de son pouvoir d’agir en conséquence. Il a remporté la présidence en étant le moins mauvais candidat et sa cote de popularité est basse. Il a mené des réformes nationales difficiles, mais n’a pas encore fait la démonstration de leur efficacité économique ou sociale. Il a aussi l’habitude de jouer jusqu’à la caricature l’élitisme et l’arrogance dans des apparitions publiques non scénarisées, comme tout récemment en disant à un chômeur qu’on pouvait trouver du travail en « traversant la rue ».

En misant exagérément sur son statut de réformateur, alors qu’il n’a pas encore prouvé sa capacité à obtenir des résultats, M. Macron risque de saboter ses propres ambitions. Il a raison de dénoncer les mouvements xénophobes qui rongent la solidarité européenne, mais combattre les nationalistes qui se nourrissent des revendications des personnes marginalisées est plus efficace quand on fait preuve de compassion envers ces personnes.

Il n’est pas évident que M. Macron comprenne les moteurs économiques ou culturels de l’euroscepticisme. Son approche du Brexit – en exhortant les autres dirigeants d’Europe continentale à adopter une ligne dure de refus du compromis avec Theresa May – traduit le désir de démontrer que la politique anti-UE conduit les nations dans une impasse. Ce principe de précaution est compréhensible, mais son application trop zélée est à courte vue. Le risque est faible de voir d’autres membres de l’UE suivre l’exemple du Royaume-Uni. La principale menace est l’inflexibilité de Bruxelles, qui pousse la Grande-Bretagne à une réaction dangereuse pour la démocratie.

M. Macron a raison de défendre fermement des positions pro-européennes, mais son style radical risque de provoquer les forces qu’il cherche à neutraliser. Il plaide bien en faveur de l’ordre international progressiste. Il ferait bien, aussi, d’écouter davantage ceux qui estiment que ce même ordre les a laissés tomber.

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr.

Photo d'illustration: Emmanuel Macron s’exprimant aux Nations unis a New-York


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