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Vendredi, 06 Déc. 2024

Quelque chose a changé dans l’affaire Assange

Auteur : Craig Murray | Editeur : Walt | Samedi, 25 Mai 2024 - 14h24

Mentionner “ce qui est en jeu ici” est la première véritable reconnaissance des problèmes majeurs de cette affaire de la part du pouvoir judiciaire en plus de dix ans de procédure. On a eu l'impression que quelque chose a changé.

Dans le cours normal des choses, si un juge très haut placé vous demande de fournir des garanties à sa Cour, il ne serait pas vraiment sage d’éviter de de faire, de consacrer une grande partie du document à essayer d’occulter le fait que vous n’en fournissez pas, puis de faire la leçon au juge sur les raisons pour lesquelles il a eu tort de vous inviter à apporter ces garanties.

Des partisans d'Assange devant la Cour royale de justice lundi. (Joe Lauria)

La plupart des juristes déconseilleraient probablement ce genre de comportement. Mais cela n’a pas découragé l’intrépide James Lewis KC, de retour pour diriger l’accusation des États-Unis contre Julian Assange, les yeux pétillants et sa chevelure marine ayant pris un aspect plus sauvage, comme s’il avait décidé d’adopter une allure de pirate pour accompagner sa gestion imprudente de l’affaire.

Ce jour d’audience de l’affaire Assange a semblé assez différent de tous les autres de ces 14 dernières années. Tout d’abord, quand je suis arrivé tôt le matin, je n’étais ni gelé ni trempé. Au contraire, le soleil était au rendez-vous et le ciel ne semblait pas vouloir se charger de pluie.

Les nombreux soutiens rassemblés devant le tribunal étaient plus animés et plus joyeux que ces derniers temps, et j’ai été agréablement surpris par le très grand nombre de graffitis “Free Assange” que j’ai croisés sur les kilomètres qui me séparaient du tribunal , tagués un peu partout dans le centre de Londres.

J’étais persuadé que nous allions gagner et que ce serait une bonne journée, tellement persuadé en fait que je suis monté sur le podium et que j’ai annoncé la nouvelle à un public un peu surpris.

Vous vous souvenez sans doute que lors du dernier jugement de la High Court, le tribunal avait demandé au gouvernement américain de lui fournir des garanties contre l’application de la peine de mort et d’assurer que Julian ne serait pas empêché, en raison de sa nationalité, de se prévaloir de la liberté d’expression garantie par le Premier Amendement auprès d’un tribunal de Virgine.

Les Américains ont fourni ce qui m’a semblé – et surtout à l’équipe juridique de Julian – une garantie suffisante contre la peine de mort.

Pas de garanties

Pour ce qui est du droit d’invoquer le Premier amendement, aucune garantie suffisante n’a été donnée. Le gouvernement américain a simplement assuré que la défense de Julian aux États-Unis aurait le droit d’invoquer le Premier Amendement.

Comprenez bien que la High Court n’a pas exigé l’assurance que le Premier Amendement prévaudrait sur les autres arguments, comme par exemple la soi-disant sécurité nationale. Elle a simplement demandé que la ligne de défense ne soit pas exclue sur la seule base de la nationalité.

Les garanties américaines ont cherché à éluder totalement la question, en l’ignorant et en tentant d’amalgamer les autres arguments susceptibles de prévaloir contre le Premier Amendement.

C’était tellement flagrant que je ne voyais pas comment la Cour pouvait statuer que les garanties américaines étaient suffisantes, et conserver un minimum d’honnêteté intellectuelle. J’ai observé les juges Jeremy Johnson et Victoria Sharp lors de la dernière audience et constaté que leur intégrité intellectuelle était indéniable. J’étais donc très optimiste quant aux chances de gagner le droit à un nouvel appel.

Pour répondre à cette nouvelle journée, l’affaire a été transférée dans une nouvelle salle d’audience, beaucoup plus grande et plus lumineuse. Le système audiovisuel destiné à la presse dans les salles voisines fonctionnait correctement. Les nouveaux dispositifs de gestion du public étaient efficaces.

On m’a même remis une carte plastifiée me donnant droit à une place dans la salle d’audience principale, au lieu du bout de papier habituel. Jamie, Jim et les merveilleux bénévoles m’ont évité de faire la queue en attendant pour moi.

De plus, Edward Fitzgerald portait une perruque de crin différente, peut-être plus jeune d’un siècle, en tout cas plus récente que le modèle précédent. Pour ceux qui contestent l’efficacité de ce blog, je peux vous dire qu’il m’a confié que mes commentaires sur sa perruque dans mon dernier rapport l’avaient incité à ressortir sa perruque de rechange. Un blog efficace !

Une fois que nous nous avons tous été installés dans cette resplendissante fausse salle d’audience médiévale, avec son extraordinaire architecture de toit en lanterne qui inonde la salle de lumière zénithale, Fitzgerald s’est levé et s’est lancé dans son affaire avec un manque notable de préambules. Il avait l’air un peu perplexe quant à ce contre quoi il était censé plaider. Il avait l’air de se battre dans le brouillard.

Fitzgerald a admis que les garanties concernant la peine de mort étaient satisfaisantes. Mais la garantie qu’Assange pourrait invoquer le Premier Amendement manquait de pertinence. Elle se contentait de stipuler qu’il pouvait “chercher à” s’en prévaloir.

En outre, cette “garantie” n’engageait même pas le procureur à faire valoir que M. Assange devait se voir refuser la protection du Premier Amendement en raison de sa nationalité. La déclaration initiale du procureur américain Gordon Kromberg devant la Cour, selon laquelle l’accusation pourrait le faire, était toujours valable.

Même si l’accusation s’engage – ce qu’elle n’a pas fait – à ne pas plaider ce point, rien ne garantit que le tribunal américain lui-même ne privera pas M. Assange de la protection du Premier Amendement en raison de sa nationalité étrangère, à la suite d’un certain nombre de précédents, y compris devant la Cour suprême des États-Unis.

La High Court a clairement souligné qu’il existe un réel risque de discrimination en fonction de la nationalité, contraire à la loi sur l’extradition, et que cette préoccupation n’a pas été prise en compte par les États-Unis. “Il existe un risque réel de discrimination et ce risque demeure avec des garanties équivoques et manifestement inadéquates”, a déclaré M. Fitzgerald à la Cour.

Mark Summers KC s’est ensuite levé pour compléter la plaidoirie de la défense.

Cette journée charnière a eu le plus grand effet sur M. Summers. Sa colère face aux événements, son impatience face au manque de compréhension des juges à l’égard des arguments s’étaient envolées. Il parlait avec tant de douceur et de gentillesse que personne n’arrivait à l’entendre.

Un rayon de lumière

Le soleil s’était levé et sa course dans le ciel et un rayon de soleil a traversé la fenêtre et illuminé Summers. Un effet trop audacieux pour Hollywood, peut-être digne des Monty Python et du Saint Graal. Je suis presque sûr d’avoir entendu chanter les anges.

Summers a déclaré avoir la tâche délicate de contrer les arguments des États-Unis avant qu’ils ne les aient formulés et a demandé à la Cour l’autorisation de reprendre la parole plus tard, ce que le juge Dame Victoria Sharp – qui avait manifestement aussi entendu le chant des anges – a immédiatement accepté.

Summers a énuméré les arguments américains contenus dans leur dossier. Il les a énumérés comme suit

  1. Assange sera sur le sol américain pendant le procès et le Premier Amendement s’appliquera donc. Mais, selon M. Summers, cet argument n’est pas conforme à la déclaration sous serment de M. Kromberg et à la jurisprudence antérieure.
  2. Il pourrait être établi qu’Assange se trouvait sur le sol américain lorsque les infractions ont été commises et que le Premier Amendement s’appliquerait. Sauf que, a déclaré M. Summers, M. Assange ne se trouvait manifestement pas sur le sol américain à ce moment-là.
  3. La nationalité est un concept plus restreint que la citoyenneté, de sorte que la discrimination n’a pas lieu d’être. M. Summers a déclaré que cette affirmation était manifestement erronée, comme le montrent de nombreux exemples, y compris la Convention sur les réfugiés.
  4. La nationalité n’est qu’un des facteurs susceptibles de faire obstacle à l’application du Premier Amendement. Summers a souligné que si la nationalité en était un, il s’agissait d’une discrimination. L’existence d’autres facteurs n’est pas pertinente.
  5. Les États-Unis affirment que le 14e amendement – qui accorde la citoyenneté à toutes les personnes nées aux États-Unis – est en quelque sorte pertinent. Summers, perplexe, a rejeté cet argument d’un revers de manche.

James Lewis KC a alors repris la parole au nom des Etats-Unis. Son numéro 2, Clare Dobbin, qui l’avait si mal remplacé lors de la dernière audience, était introuvable. Je crains qu’elle n’ait pas seulement été reléguée sur le banc des remplaçants, mais qu’elle ait été transférée.

M. Lewis a déclaré qu’il incombait à l’appelant (Julian) de prouver qu’il existe une possibilité sérieuse ou des motifs raisonnables de craindre un préjudice en raison de sa nationalité australienne.

L’article 81b de la loi sur l’extradition prévoit que le tribunal peut interdire l’extradition dans les cas suivants

“S’il est extradé, il pourrait subir un préjudice lors de son procès ou être condamné, détenu ou limité dans sa liberté personnelle en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son sexe, de son orientation sexuelle ou de ses opinions politiques”.

Il s’agit d’une clause anti-discrimination, ce qui signifie qu’il faut démontrer un traitement injuste à la différence des traitements de référence, en l’occurrence ceux d’un citoyen américain.

Lewis a ensuite semblé s’en prendre à Dobbin, absente. Il a déclaré qu’il souhaitait attirer l’attention sur un arrêt de la Cour d’appel qui, “pour une raison quelconque”, n’avait pas été souligné lors de l’audience précédente.

Dans une affaire portée devant la Cour d’appel, le ministre des Affaires étrangères avait obtenu gain de cause contre une allégation de discrimination injuste de sa part consistant à traiter les citoyens britanniques différemment des résidents britanniques non citoyens, lors de démarches effectuées en leur nom au sujet de l’incarcération à Guantanamo Bay. Cette affaire a montré qu’il était légitime de traiter différemment les citoyens et les non-citoyens.

L’arrêt stipule qu’“une personne qui n’est pas un citoyen britannique n’a pas droit de bénéficier d’une protection”. La citoyenneté britannique est simplement un fait de droit et n’a rien à voir avec les caractéristiques de la personne. “C’est le bon prisme à travers lequel il faut regarder cette affaire”.

Permettez-moi de souligner que j’ai déjà annoncé, avant que les garanties américaines ne soient données, les arguments précis et exacts des États-Unis, y compris celui-ci : qu’il est légitime de traiter les citoyens différemment des autres ressortissants en termes de protection consulaire (ce concept juridique tout à fait routinier est la seule chose que dit réellement l’affaire de Guantanamo Bay citée par M. Lewis).

 

M. Lewis a poursuivi en affirmant que M. Assange ne serait pas victime de discrimination en raison de sa nationalité australienne, mais qu’il serait plutôt traité différemment en tant que non-ressortissant américain. Ce qui est en cause, c’est la “simple donnée factuelle” de sa non-citoyenneté américaine.

M. Lewis a déclaré que l’allégation de discrimination ne fonctionne ici que sur des questions de procès équitable, et que les garanties portent sur des questions de procès équitable. On garantit à M. Assange un procès équitable.

Bien que le tribunal ait suggéré que le Premier Amendement devrait s’appliquer parce qu’il accorde à M. Assange le type de protection de l’article X de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) à laquelle il aurait droit, il convient de noter que l’article X ne couvre que le journalisme “raisonnable et responsable”. Ce n’est pas ce qu’aurait fait M. Assange.

L’un des facteurs susceptibles de définir ce qui est “raisonnable et responsable” pourrait être le lieu où le journalisme a été pratiqué. M. Assange a choisi de publier hors la juridiction compétente de la source des informations. Cela n’était pas responsable, a déclaré M. Lewis.

Il existe de nombreux autres facteurs, et pas seulement la nationalité, qui déterminent si le Premier Amendement s’applique. Il s’agit notamment de la sécurité nationale des États-Unis. M. Assange s’est vu garantir un procès équitable sur tous ces points, a déclaré M. Lewis :

“Il pourra invoquer le Premier Amendement, mais cela ne signifie pas qu’il y parviendra. En droit, M. Assange est un étranger qui, dans un pays étranger, commet des actes qui portent atteinte à la sécurité nationale des États-Unis”.

Il y a également 18 chefs d’accusation, couvrant différentes catégories d’infractions. Certains de ces chefs d’accusation, tels que le piratage et la conspiration en vue de voler des documents, ne pourront jamais bénéficier de la protection du Premier Amendement. Cela a été clairement démontré dans le jugement de Chelsea Manning, a déclaré M. Lewis. Le comportement d’Assange n’est pas protégé par le Premier Amendement, a-t-il conclu.

La réponse de M. Summers 

Les soutiens d’Assange lundi devant le bâtiment de la Cour. (Joe Lauria)

Mark Summers a ensuite obtenu le droit de réponse qui lui avait été promis pour la défense. Il a déclaré que la notion de discrimination légitime fondée sur la nationalité ne s’appliquait pas ici. Il s’agit d’une procédure judiciaire.

Aucune des affaires citées par l’accusation ne concerne la procédure judiciaire. L’article 81b interdit toute discrimination fondée sur la nationalité dans le cadre d’un procès. Le fait que, dans d’autres situations, la nationalité ait un effet juridique n’est pas pertinent.

En ce qui concerne la distinction faite entre la nationalité et la citoyenneté, il convient de noter que le procureur Kromberg déclare qu’Assange peut être privé de la protection du Premier Amendement sur la base de la nationalité, et non de la citoyenneté.

L’argument selon lequel la nationalité n’est qu’un des facteurs susceptibles d’exclure le Premier Amendement ne tient pas, a soutenu M. Summers. M. Lewis a déclaré que M. Assange pourrait être privé du Premier Amendement parce qu’il est “un étranger qui commet des actes sur un sol étranger”. Il s’agit d’une discrimination fondée sur la nationalité. S’il était ressortissant américain, le Premier Amendement s’appliquerait. Les autres facteurs ne sont plus pertinents.

Pouvoir invoquer le Premier Amendement et faire valoir ses arguments n’est pas la même chose que d’affirmer que cet argument sera forcément retenu.

Le jugement contre Chelsea Manning n’est pas pertinent. Manning occupait une position différente. Il s’agissait d’une employée du gouvernement, d’une lanceuse d’alerte et non d’une journaliste. Sa situation au regard du Premier Amendement était totalement différente.

L’argument selon lequel le Premier Amendement s’appliquerait automatiquement si Assange se trouvait sur le sol américain est tout simplement inexact. Plusieurs précédents l’ont démontré.

M. Summers a ensuite redonné la parole à Edward Fitzgerald. À ce moment-là, M. Lewis s’est levé pour faire objection. Il a déclaré qu’il ne s’était pas opposé à ce que Summers réponde, bien que cela ne relève pas de la procédure convenue à l’origine. Mais le fait que deux personnes répondent lui semble excessif.

Le juge Sharp a répondu avec beaucoup de sérieux. “Compte tenu de ce qui est en jeu ici”, a-t-elle dit, “j’écouterai tout ce que chacun aura à dire”. S’il le souhaite, Lewis pourra répondre à son tour après Fitzgerald.

Ce “compte tenu de ce qui est en jeu ici” a été très surprenant. C’était la première fois, en plus de dix ans de procédure, que le pouvoir judiciaire reconnaissait réellement les enjeux majeurs de cette affaire, et peut-être aussi les conséquences dévastatrices pour Julian sur le plan personnel. On sentait que quelque chose avait changé.

Fitzgerald s’est ensuite lancé. Le point le plus important, a-t-il dit, est le silence assourdissant de Kromberg. Il aurait pu garantir que l’accusation ne chercherait pas à soutenir que Julian devrait être privé de la protection du Premier Amendement en raison de sa nationalité. Mais il ne l’a pas fait.

Il était tout à fait normal que les garanties diplomatiques incluent l’engagement de l’accusation à poursuivre ou à ne pas poursuivre une certaine ligne de conduite. Dans ce cas précis, ils ont assuré que l’accusation ne chercherait pas à porter d’accusations susceptibles d’entraîner la peine capitale.

Pourtant, Kromberg n’a pas affirmé qu’il ne poursuivrait pas l’interdiction du Premier Amendement, alors qu’il avait au contraire déclaré sous serment qu’il pourrait effectivement le faire.

Les garanties proposées étaient tout sauf des garanties. Lewis avait dit qu’Assange serait en mesure d’invoquer le Premier Amendement, mais ce n’est pas ce que signifiaient les “garanties”. Elles signifiaient plutôt qu’il pourrait chercher à invoquer le Premier Amendement, ce qui n’est pas du tout la même chose.

L’extradition ne peut être accordée en raison du trop grand nombre de questions non résolues concernant les pratiques du procureur ainsi que des questions de droit, a déclaré M. Fitzgerald à la Cour.

Les plaidoiries se sont achevées au bout de 90 minutes. Le juge Sharp s’est levé et a déclaré qu’elle et le juge Johnson seraient de retour après dix minutes pour exposer la suite des événements.

En fin de compte, cela a pris vingt minutes. Lorsqu’elle est revenue, la juge Sharp arborait un visage des plus solennels. Elle a tout d’abord déclaré que tout le monde devait écouter la décision en silence et que si quelqu’un pensait ne pas pouvoir le faire, il devait quitter le tribunal sur-le-champ.

Je dois avouer que je me suis inquiété. Si les juges se prononçaient contre Julian, l’extradition pourrait être immédiate. Il pourrait simplement être emmené directement sur un aéroport militaire. Le juge Sharp s’attendait-il à des protestations ?

Mes craintes se sont aussitôt dissipées. Mme Sharp a simplement déclaré que le droit d’appel était accordé pour les motifs 4 et 5 des requêtes, à savoir la liberté d’expression et la discrimination fondée sur la nationalité. Elle a également déclaré explicitement que le droit d’appel s’appliquait à tous les chefs d’accusation, rejetant ainsi l’argument de Lewis selon lequel certains des chefs d’accusation ne pouvaient pas être invoqués pour défendre la liberté d’expression.

Les deux parties ont jusqu’à vendredi pour soumettre un mémorandum commun sur la procédure et le calendrier de l’audience d’appel.

abandonnés et ne peuvent être réintroduits. Nous en sommes maintenant réduits à un seul point, celui de la liberté d’expression et de la discrimination par la nationalité. Mais je ne vois pas comment les États-Unis peuvent s’en sortir.

La liberté en vue

Lors de l’audience sur le fond, la question, les arguments et la jurisprudence seront exactement les mêmes que lors de l’audience préliminaire. Seule la question des preuves sera différente. La défense n’a eu qu’à démontrer qu’il existait un cas de discrimination défendable. Lors de l’audience au fond, elle devra prouver que cet argument est recevable.

Mais compte tenu des performances réalisées ici et du fait que les juges n’ont pris que quelques minutes – alors que tout le monde s’attendait à au moins plusieurs jours – pour rejeter les arguments de l’accusation américaine, je ne vois pas comment les États-Unis peuvent maintenant l’emporter.

Nous ne savons pas quand aura lieu l’audience de fond. Je parierais sur le mois d’octobre, même si l’équipe juridique estime que le mois de juillet est envisageable. Bien sûr, Julian est toujours détenu dans une horrible prison de haute sécurité. Mais la liberté est en vue.

Les plus cyniques pourront y voir un nouveau coup de pied dans la fourmilière et une mise en veilleuse de la procédure jusqu’après l’élection présidentielle américaine, car Joe Biden serait bien mal avisé de ramener Julian enchaîné à Washington en pleine campagne. Mais ce n’est pas ce que je ressens. Je pense qu’il s’agit d’une véritable victoire et que nous sommes sur la voie du succès et de la liberté avant Noël.

Il est peu probable, mais pas impossible, que les juges qui ont accepté l’appel soient ceux qui l’instruiront, et je crains donc que ce soit la dernière fois que nous voyons Dame Victoria Sharp. L’affreux juge en chef conservateur Burnett a pris sa retraite, et je m’attends donc à ce que l’appel soit entendu par la juge en chef Sue Carr, qui n’a jamais été saisie de l’affaire.

Fait notable, jusqu’à présent, les femmes juges se sont montrées beaucoup moins influençables par les intérêts des services de sécurité que les hommes juges dans cette longue saga. Il semble que les magistrats aient à nouveau trouvé un moyen d’empêcher l’extradition, qui n’implique aucun jugement sur l’intérêt public de la révélation de crimes de guerre ni aucune discussion sur les questions relatives aux documents révélés par Wikileaks qui sont les plus embarrassants pour les États-Unis.

Si les États-Unis perdent cette affaire, comme c’est actuellement le cas, M. Biden risque fortement de perdre sur toute la ligne. En abandonnant l’affaire, il n’aura plus aucun mérite à promouvoir la liberté d’expression et la liberté des médias.

D’un autre côté, les faucons le qualifieront de perdant incapable de remporter une affaire importante pour la sécurité nationale, même chez son allié le plus proche. La logique politique qui veut que Biden choisisse d’abandonner l’affaire est tout à fait convaincante. Mais les intérêts de Biden peuvent-ils prévaloir sur ceux de la C.I.A. ?


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