Éric Denécé victime de Myrotvorets ?

Suicide ou pas, Éric Denécé nous lègue un riche héritage dans le domaine du Renseignement et de la connaissance. En plus de nous avertir sur la dangerosité de la criminalité ukrainienne.

Cela fait plus d’une semaine qu’Éric Denécé nous a quitté. La piste du suicide reste privilégiée par l’autorité d’investigation compétente. Pourtant, une partie significative de ses proches n’y croient pas. Ses nombreux partenaires et collaborateurs l’attestent. Denécé, entre autres, co-fondateur du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R) et auteur ou co-auteur de 29 ouvrages avait encore la tête pleine de projets. Il menait une vie saine, sportive et prenait soin de lui. Certes, il avait quelques soucis financiers provoqués par la perte de mandats de consulting. À ce titre, ses analyses géopolitiques toujours d’une grande rigueur et exprimées publiquement n’étaient pas du goût de tous.

Éric Denécé, âgé de 62 ans, était une véritable encyclopédie. Je l’ai personnellement contacté deux fois. À l’été 2024, pour lui demander des informations, dans le cadre d’une étude que je faisais sur Cosa Nostra et en février dernier pour avoir des renseignements sur les services de sécurité marocains aussi efficaces que controversés.

Les hommages élogieux ont été nombreux. Cet ancien du Renseignement militaire français était particulièrement apprécié par Didier Maïsto, par le média d’investigation Omerta mais également par Tocsin et Clémence Noudiakova ; par TVL ; par Ligne droite ; par Radio Courtoisie et par Le dialogue franco-russe pour ne citer que ceux-ci.

Si pour Paul-Marie Coûteaux la thèse de l’assassinat est à privilégier, Tigrane Yegavian, proche collaborateur au CF2R, qui lui a rendu un vibrant hommage au micro de Liselotte Dutreuil – tempère : «Qui Denécé dérangeait-il vraiment ?»

Où plutôt qui il ne dérangeait pas ? Éric Denécé savait beaucoup et sur beaucoup de choses.

Le suicide et ses caractéristiques

La famille et les proches d’Éric Denécé ont de la peine à y croire. Aucun signe précurseur n’aurait été décelé. Seulement voilà, le suicide qui est une échappatoire ; une sanction de la perte du sens de la vie ; la manifestation d’un ras-le-bol ne prévient pas toujours. Une accumulation prolongée d’adversités peut mener tout à chacun dans un passage à vide – compris entre quelques minutes et quelques semaines. C’est suffisant pour s’ôter la vie. Et pour un être libre cela peut prendre une allure chevaleresque.

Notons que le suicide est un vrai sujet de Santé publique et le nombre de cas augmente sous nos latitudes.

L’usage du fusil de chasse et significations

Dans la constellation du crime organisé, l’assassinat avec un fusil de chasse, avec tir à la tête, signifie un acte de vengeance. Ce type d’assassinat peut avoir plusieurs significations, selon les circonstances et le message à transmettre. Celui-ci étant le plus souvent l’avertissement par l’exemple.

Le fusil de chasse est une arme puissante et désordonnée, souvent associée à une violence extrême.

Un tir à la tête, à bout portant, est une exécution froide et définitive. Montrant une volonté d’éliminer la cible sans discussion.

La thèse de l’assassinat

Le géopoliticien renommé François Martin est ce ceux – nombreux qu’ils sont – qui ne l’exclut pas. Et il nous met sur la piste de la plateforme Myrotvorets. En ukrainien : «Миротворець», littéralement «Le Pacificateur». C’est un site web ukrainien controversé, créé en 2014, qui se présente comme une base de données recensant des personnes considérées – par qui ? par la haute criminalité qui gangrène le régime de Kiev – comme des ennemis de l’Ukraine. Créé pendant la guerre du Donbass cette plateforme a pour finalité – officiellement – à documenter les crimes contre la sécurité nationale de l’Ukraine.

Dans les faits, Myrotvorets publie des noms, photos, adresses et données personnelles de milliers d’individus (journalistes, politiciens, militants, étrangers), souvent accompagnés d’accusations comme «collaboration avec le terrorisme» ou «propagande pro-russe». 

Parmi les cibles figurent des Russes, des Ukrainiens pro-russes, mais aussi des journalistes occidentaux comme la française Anne-Laure Bonnel ou des personnalités ayant exprimé des positions jugées favorables à Moscou. 

En 2022, l’assassinat de la journaliste russe Darya Douguina qui figurait sur Myrotvorets, confirmait le fait qu’il est bien question d’une liste noire accompagnée d’un appel au meurtre. Des organisations comme Amnesty International ont critiqué le site pour ses atteintes à la vie privée et son rôle dans une «justice extrajudiciaire».

Pour sa part, le gouvernement ukrainien ne reconnaît pas officiellement Myrotvorets, mais certains responsables l’ont tacitement soutenu.

Selon François Martin, Denécé y figurait. Votre serviteur, en ce jour du 23 juin 2025, n’a pas trouvé son nom mais il a pu être enlevé depuis la survenance du décès.

On y trouve, entre autres, les noms de journalistes, d’analystes, de militants et de politiques français, belges et suisses. À un stade que La Société suisse des journalistes (SSJ) a exprimé ses préoccupations concernant les risques pour la sécurité des professionnels des médias listés. Pour sa part, le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) a condamné à plusieurs reprises les listes de «cibles» comme Myrotvorets, soulignant les dangers pour la liberté de la presse. Certains parlementaires ont demandé des enquêtes sur l’impact de ces listes sur les citoyens suisses. 

Éric Denécé ne cessait de dénoncer publiquement le haut très niveau de corruption qui gangrénait l’entourage de Zelensky.

Votre serviteur a lui-même écrit à l’Office fédéral suisse de la police (OFSP), au printemps 2022, pour prévenir que dans les flux de «réfugiés de guerre» qui se déversaient alors sur l’Europe occidentale on trouverait fatalement des éléments du crime organisé ukrainien. Cette même criminalité notoire et couramment dénoncée dans nos médias mainstream avant février 2022 et qui n’est pas étrangère l’exode de quelques neuf millions d’ukrainiens entre 1991 et 2022.