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Le prince clown saoudien a contrarié les journalistes mainstream en s’en prenant à l’un des leurs

Auteur : Moon of Alabama (Etats-Unis) | Editeur : Walt | Mercredi, 10 Oct. 2018 - 10h05

La Moustache de la sagacité*, Thomas Friedman, chroniqueur au New York Times, est furieux que le prince clown saoudien Mohammad bin Salman ait fait kidnapper le journaliste Jamal Khashoggi.

Khashoggi, qui vient d’une famille très riche, a longtemps servi le régime saoudien à des postes éditoriaux, et a été le conseiller en communication du prince Turki al-Faisal pendant son mandat d’ambassadeur à Londres et à Washington. Il a quitté l’Arabie saoudite l’année dernière pour ne pas tomber victime de la répression menée par le prince clown Mohammad bin Salman. Il s’est mis à écrire des articles légèrement critiques pour le Washington Post. Khashoggi n’est pas un libéral mais un fervent partisan du système saoudien et de sa brutalité. Loin de les désapprouver, il a qualifié les décapitations de soldats syriens par l’EI de « tactique militaire psychologique efficace », et il a soutenu l’infâme guerre saoudienne contre le Yémen.

Selon la police turque, Khashoggi est entré au consulat saoudien à Istanbul le 2 octobre à 13h12 pour y prendre ses documents de divorce, et il n’en est jamais ressorti. Le même jour, 15 citoyens saoudiens étaient arrivés à Istanbul à bord de deux avions et se trouvaient dans le bâtiment du consulat en même temps que Khashoggi. Ils ont ensuite quitté la Turquie. Des sources anonymes de la police turque ont affirmé que le groupe d’agents saoudiens avait tué Khashoggi dans le consulat et coupé son corps en morceaux pour les emporter avec eux. Cette horrible histoire a peu de chances d’être vraie. La Turquie, qui est elle-même connue pour mettre ses journalistes en prison, entretient de mauvaises relations avec l’Arabie saoudite et soutient son ennemi juré, le Qatar. Le gouvernement saoudien a un long passé d’enlèvements et de rapatriements d’éminents Saoudiens qui avaient fui le pays. Mais il ne tue pas ces gens-là  à l’étranger.

Les premiers articles occidentaux flagorneurs sur Mohammad bin Salman, en particulier ceux du Washington Post, le présentaient comme un réformateur. Ce qu’il n’a jamais été. Il l’a reconnu lui-même dans une récente interview à Bloomberg. Aucun de ses prédécesseurs, qui ont tous été présentés comme  des réformateurs par les médias grand public, n’a jamais vraiment changé le système archaïque saoudien. Pourtant, lorsque M.B.S. s’est rendu aux États-Unis ce printemps, tous les milliardaires de la Silicon Valley, y compris Jeff Bezos, propriétaire du Washington Post, voulaient être photographiés avec lui.

Mais personne n’a léché le c… de Bin Salman avec autant de passion que Tom Friedman. Lisez cet extrait de sa fanfiction la plus embarrassante de l’année dernière :

Nous nous sommes rencontrés, une nuit, dans le magnifique palais aux murs d’adobe de sa famille à Ouja, au nord de Riyadh. M.B.S. s’exprimait en anglais, tandis que son frère, le prince Khalid, le nouvel ambassadeur saoudien aux États-Unis, et plusieurs ministres de haut rang partageaient différents plats d’agneau et épiçaient la conversation. Après avoir passé près de quatre heures en sa compagnie, j’ai déclaré forfait à 1h15 du matin devant sa jeunesse, en soulignant que j’avais exactement deux fois son âge. Cela fait très, très longtemps, cependant, qu’aucun dirigeant arabe ne m’avait épuisé sous un pareil flot de nouvelles idées pour transformer son pays.

Tom Friedman (à gauche) en conversation avec Mohammad bin Salman (interprétation artistique)

Les journalistes mainstream qui ont pris les armes pour défendre Khashoggi sont pour la plupart fort gênés de leur adoration passée pour Mohammad bin Salman. Mais le plus important pour eux, c’est que Khashoggi est un des leurs. Ils se considèrent comme de véritables aristocrates qu’on ne doit pas traiter comme ça. Ce genre de traitement doit être réservé à la plèbe des déplorables qu’ils regardent de haut.

Voyez vous-même l’indécence cynique de cet extrait de la chronique pleurnicharde de Friedman sur l’affaire Khashoggi :

Si Jamal a été enlevé ou assassiné par des agents du gouvernement saoudien, ce sera un désastre pour M.B.S. et une tragédie pour l’Arabie saoudite et tous les pays du Golfe arabe. Ce serait une violation innommable des normes de la décence humaine, pire, non pas en nombre de victimes, mais sur le principe, que la guerre au Yémen elle-même.

Toutes les dix minutes, un enfant au Yémen meurt de faim à cause de la famine causée par la guerre que mènent contre ce pays l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, les États-Unis et le Royaume-Uni. La dernière attaque contre le port de Hodeidah et l’hyperinflation de ces derniers mois ont doublé les prix des denrées alimentaires et de l’essence. La plupart des Yéménites n’ont plus les moyens de se procurer assez de nourriture. Des dizaines de milliers de personnes meurent déjà de faim en silence, il y en aura bientôt des millions d’autres. Selon quel « principe » humanitaire la mort potentielle d’un chroniqueur courtisan serait-elle pire que cela ?

L’Arabie saoudite de Mohammad bin Salman est faible et vulnérable. L’enlèvement de Khashoggi en est la preuve. Le pays ne peut pas se permettre la moindre critique. C’est un état de fait qui enchante les États-Unis. L’administration de Trump peut ainsi plus facilement soutirer de l’argent au royaume en perdition. L’administration ne critiquera pas le traitement de Khashoggi par le régime de Salman. Le Congrès non plus. L’an dernier, les Saoudiens ont consacré 27,3 millions de dollarsà faire du lobbying à Washington. Ils soudoient tous les sénateurs qui veulent bien de leur argent.

La seule chose que l’administration Trump pourrait faire dans l’affaire Khashoggi serait d’accuser Qasem Soleimani et le GRU d’ingérence. Le MI-6 pourrait bientôt découvrir qu’un agent iranien a novichoké Khashoggi.

Lorsque le département d’État condamnera – dans les termes les plus durs – l’Iran pour avoir enlevé Khashoggi, lorsque le Trésor sanctionnera à nouveau la Russie, et lorsque le Pentagone augmentera son soutien au bombardement du Yémen, Friedman et les autres lèches-culs patentés seront les premiers à applaudir.

Note :*c’est le surnom que donne à Friedman un blog satirique qui lui est entièrement dédié.

Traduction: Dominique Muselet


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