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Samedi, 18 Mai 2024

Et voici le tournant du quinquennat !

Auteur : Jérôme Béglé | Editeur : Walt | Mardi, 08 Mars 2016 - 22h45

« Ça passe ou ça casse. Et même si ça passe, il y aura beaucoup de casse ! » Ce (très) proche de François Hollande ne cache pas son pessimisme devant l'extraordinaire zone de turbulence dans laquelle est entré l'exécutif. Le Sénat s'apprête à examiner dans 10 jours le projet de loi sur la révision constitutionnelle visant à introduire la déchéance de nationalité. Gérard Larcher a déjà annoncé que le texte adopté par l'Assemblée nationale serait réécrit afin de lui redonner le sens et l'esprit que lui avait donnés François Hollande lors de son discours à Versailles en novembre dernier. Un habile tacle visant à mettre le chef de l'État devant ses responsabilités et qui souligne à quel point celui-ci s'est montré versatile.

Les départs d'incendie sont multiples. Martine Aubry a sonné la charge dans Le Monde contre la loi El Khomri, et a réactivé cette semaine son association Renaissance, destinée à faire de la politique autrement. Ses fidèles ont annoncé qu'ils quittaient la direction du PS. Le député Pouria Amirshahi a quant à lui annoncé qu'il quittait carrément le parti et il semble acquis que d'autres cadres le suivront d'ici l'été. Ajoutez à cela la rivalité Valls/Macron qui pourrait tourner à la guerre de tranchées et les couacs gouvernementaux qui redoublent.

Plus d'un million de signataires

Ce tableau sombre devient apocalyptique quand on se penche sur la loi El Khomri censée réformer le Code du travail. Avant même d'être examinée en conseil des ministres, elle a déjà fracturé le parti majoritaire, soudé un front syndical contre le gouvernement et réveillé des associations lycéennes et étudiantes, dont la mobilisation est le pire cauchemar des gouvernements. La pétition demandant son abrogation pure et simple frôle désormais les 1,1 million de signatures et recrute près de 100 000 aficionados chaque jour : du jamais-vu en France ! Abandonner le texte serait suicidaire et aboutirait sans doute à la démission du Premier ministre Manuel Valls ; le passage en force est en l'état illusoire tant la majorité pour voter cette loi est aujourd'hui introuvable et les conséquences sociales imprévisibles. Reste donc à renégocier article par article les points litigieux. On se demande pourquoi cela n'a pas été fait avant et à quel rétrécissement de voilure ce replâtrage aboutira. Quoi qu'il en soit, voici le gouvernement embarqué avec les deux lois pendantes devant le Parlement dans un marathon de plusieurs semaines à l'issue totalement incertaine...

Cerise sur le gâteau, le projet de loi fourre-tout du gouvernement relatif à « la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement » augmente les pouvoirs de la police et des procureurs, au détriment des magistrats du siège. Perquisitions de nuit, assignations à résidence en dehors de l'état d'urgence, déploiement des techniques d'espionnage et généralisation des contrôles d'identité… Le texte est fustigé par les écolos et l'aile gauche du PS. Les avocats sont vent debout contre le projet. Pour la première fois dans l'histoire, l'ensemble des barreaux européens a signé une déclaration commune pour dénoncer « la dérive liberticide d'un État membre : la France ».

Deux législatives partielles à haut risque

Ce printemps, deux élections partielles viendront affaiblir un peu plus le groupe socialiste à l'Assemblée et vont donner lieu à des règlements de comptes entre les différentes factions de la gauche. Les 17 et 24 avril, il faudra remplacer Jean-Marc Ayrault dans la troisième circonscription de Loire-Atlantique. Les militants PS doivent départager 5 candidats... Autant d'occasions de se déchirer alors que Les Républicains ont investi le leader de l'opposition municipale à Saint-Herblain, Matthieu Annereau. Les écologistes ont déjà annoncé qu'ils présenteraient un candidat. Élu au premier tour avec 56 % des voix, l'actuel ministre des Affaires étrangères n'est pas sûr que l'un des siens le remplace au Palais-Bourbon.

Le député socialiste du Bas-Rhin Armand Jung a quitté le 1er mars ses fonctions pour raisons de santé. Éric Elkouby, son principal collaborateur, devrait être le candidat socialiste. Il aura fort à faire face à un Front national arrivé au second tour lors des dernières départementales. Les Républicains pourraient investir Elsa Schalk, l'une des figures montantes de la droite strasbourgeoise, vice-présidente de la nouvelle région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine. Cette circonscription semble être gagnable pour la gauche qui a réussi à conserver son leadership à Strasbourg lors des derniers scrutins. Sauf si des listes dissidentes venaient à fleurir...

À court et moyen terme, rien ne viendra mettre « un peu de soleil dans l'eau froide » du chef de l'État. L'Unedic pronostique une baisse du chômage pour 2018, les économistes reparlent du spectre d'un krach boursier et financier ainsi que d'une progression spectaculaire des taux d'intérêt, le Brexit n'est plus un fantasme, tandis que l'arrivée massive de migrants en Europe (mais pas en France où seuls 1 500 se seraient installés) fragilise les relations entre les poids lourds du continent...

Pour passer cet hiver politique qui n'en finit plus, François Hollande sera tenté, malgré ses dénégations, de fermer la boutique, c'est-à-dire de présider sans réformer, de plastronner sans prendre de risque, de prononcer de grandes phrases sans jamais entrer dans le concret. Pris dans les congères de ses contradictions et de ses mensonges, le voici immobile et à la merci de ses contestataires... Les 14 derniers mois de son quinquennat seront longs, très longs...


- Source : Le Point

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