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Les lobbies pro-israéliens infiltrent des agents d’influence au cœur du Parlement Européen

Auteur : Pour la Palestine | Editeur : Walt | Mardi, 22 Déc. 2015 - 16h32

La récente décision de l’Union Européenne à propos de l’étiquetage des produits des colonies en Cisjordanie – qui ne fait rien d’autre  que donner une apparence de légalité à des produits qui, pour que l’U.E. se conforme à ses obligations, devraient être tout simplement interdits à l’importation –  a suscité en Israël une véritable hystérie dans les milieux politiques, dans la majorité de droite extrême comme dans l’opposition.L’Union Européenne est systématiquement décrite dans les médias israéliens comme hostile à Israël, et bien entendu les accusations d’antisémitisme n’ont pas manqué.

La réalité mise en lumière par le journaliste David Cronin est bien différente : les lobbies pro-israéliens, dotés de moyens considérables, infiltrent des agents d’influence jusqu’au cœur du Parlement Européen, qui se montre à leur égard particulièrement “compréhensif”. L’exemple dont il est question ici est particulièrement éclairant, mais il faudrait être bien naïf pour croire qu’il est unique…

A la fois directeur dans un lobby pro-israélien et conseiller au Parlement Européen ? Pas de problème !

Nuno Wahnon Martins – DR

David Cronin a mis en évidence récemment, dans un article publié par «The Electronic Intafada» que le Parlement européen ne répugne pas à faire appel, pour l’organisation de certaines de ses activités les plus importantes ayant trait au Moyen-Orient à un agent d’influence pro-israélien, Nuno Wahnon Martins. Nuno Wahnon Martins n’est autre qu’un représentant du «European Jewish Congress» (Congrès juif européen) , dont le site web le présente comme «directeur des affaires européennes».

L’intéressé, explique David Cronin, se présente lui-même comme un conseiller de Fulvio Martusciello, un membre du Parti populaire européen appartenant en Italie à Forza Italia, le parti de Silvio Berlusconi. Cet homme politique de droite se trouve être aussi président de la «Délégation pour les relations avec Israël» du Parlement européen depuis 2014.

Citant une source bien informée qui a requis l’anonymat, David Cronin affirme que depuis que Nuno Wahnon Martins joue ce rôle, il l’a pris à ce point à cœur qu’en fait c’est lui qui “mène la danse” au sein de cette commission. L’importance que ce lobbyiste a acquise dans le déroulement des travaux suscite des question très sérieuses quant à l’indépendance de cette “délégation”.

Le «Congrès juif européen» exerce en permanence des pression sur l’Union européenne pour qu’elle adopte des positions favorables à Israël. Dès lors la question se pose : a-t-il réussi à parachuter un de ces agents d’influence à une position clé au cœur même d’une des institutions les plus importantes de l’U.E. ? Tout indique que oui.

David Cronin a fait parvenir quelques questions à Wahnon par courriel. Celui-ci a alors proposé de le rencontrer. En dégustant un café, il lui a expliqué qu’il travaille pour le «Congrès juif européen» en tant que consultant indépendant (ce qui semble contradictoire avec le titre de “directeur” que l’organisation lui attribue publiquement).

Wahnon a affirmé qu’il ne perçoit aucun salaire pour le travail qu’il effectue au Parlement européen, mais qu’il a seulement à deux reprises obtenu le remboursement de frais (autour de 100 €). Il ne nie pas qu’il exerce un rôle de conseiller, sans que cela ait fait l’objet d’une approbation par l’administration du Parlement. Le réglement du Parlement ne contient aucune disposition particulière en ce qui concerne le recrutement de conseillers – contrairement aux assistants de recherche et au personnel de secrétariat – par les députés. C’est que tout simplement les fonctions de conseiller auprès des présidents des “délégations” (ou commissions) n’existent pas.

Transparent ?

Wahnon affirme qu’il n’existe aucun conflit d’intérêt et qu’il a été parfaitement transparent en ce qui concerne ses activités. Sur son compte Twitter, par exemple, il s’affiche ouvertement comme étant à la fois directeur des affaires européennes du «Congrès juif européen» et comme conseiller du député européen italien Martusciello.

«Il aurait été beaucoup plus simple de ne rien dire», se défend Wahnon. «Mais cela aurait été bien moins transparent».

La «Délégation pour les relations avec Israël» a récemment accueilli à Bruxelles ce qui est présenté comme «des jeunes leaders politiques, principalement d’Israël et de Palestine». Dans le programme de cette visite,Wahnon figure en tant qu’“assistant” de Martusciello.

David Cronin a interrogé l’administration du Parlement européen afin de savoir si elle considère le recrutement d’un lobbyiste professionnel pro-israélien comme un conflit d’intérêt, et si elle comptait enquêter à ce propos. Une porte-parole de l’administration, Marjory van den Broeke, a répondu au journaliste que «M. Martusciello n’a aucun assistant du nom de Nuno Wahnon Martins figurant sur la liste des salariés du Parlement européen».

David Cronin l’a alors informée de ce qui figure sur le compte Twitter de l’intéressé, et il a demandé si le Parlement rémunère des conseillers pour les présidents des “délégations”. La réponse fut négative.

Dédain

Pour David Cronin, cette attitude dédaigneuse est symptomatique d’un problème plus vaste : le Parlement européen ne s’intéresse pas à la manière dont des lobbyistes qui ont des agendas néfastes contribuent à façonner beaucoup de ses activités et des politiques qu’elle adopte.

Dans son livre «Corporate Europe», David Cronin montre comment des membres du Parlement ont signé et déposé des propositions d’amendements aux règlements du secteur financier, des amendements qui avaient été rédigés pour eux par des banques et des fonds spéculatifs. Et comment beaucoup de ces amendements furent approuvés par une majorité de parlementaires, avec pour résultat que les propositions prétendument destinées à éviter une crise économique ont été influencées par ceux-là mêmes qui sont les premiers responsables de la crise.

Les relations du Parlement européen avec Israël sont, de manière similaire, soumises à des influences de même nature, tout aussi inavouables.

Du fait de sa position, Fulvio Martusciello impose le respect de l’élite israélienne. Il se sert des tribunes qui lui sont offertes pour exprimer des opinions contredisent à la fois l’opinion publique en Europe et – du moins dans certains cas – la politique officielle de l’UE. Selon The Jerusalem Post, il a affirmé que la décision de l’UE sur l’étiquetage des produits des colonies constitue une « discrimination criminelle » contre Israël.

Martusciello a aussi adopté au mot près la pseudo-argumentation développée par Netanyahou en affirmant que « l’Europe se fait entendre quand il s’agit d’Israël, mais elle se tait quand il s’agit des 200 autres conflits à travers le monde ». C’est très exactement le contraire de la vérité, puisque par exemple  l’an dernier l’UE a imposé un embargo sur les armes à la Russie, mais elle a refusé ne serait-ce que d’envisager l’idée même de mettre un terme à son commerce des armes avec Israël, comme le rappelle David Cronin.

Bien évidemment, Martusciello est libre de dire ce qu’il souhaite à titre personnel. Mais il n’est pas acceptable qu’il  invite un lobbyiste pro-Israël à détourner véritablement la mission d’une institution du Parlement européen. Le «Congrès juif européen» n’est pas la voix des juifs à travers ce continent, en dépit de ce qu’il cherche à faire croire. Au contraire, il s’agit d’un groupe de pression éminemment partisan, souligne David Cronin.

Wahnon, titulaire d’un diplôme d’avocat au Portugal, a fait de la défense de la politique du gouvernement d’Israël à Bruxelles l’essentiel de sa carrière. Il avait antérieurement travaillé pour deux autres groupes pro-Israël, B’nai B’rith et les Amis européens d’Israël.

Wahnon a confirmé à David Cronin que son badge d’accès aux bâtiments du Parlement le répertorie comme stagiaire. Or, quand David Cronin a téléphoné au cabinet de Martusciello, demandant à parler à Martusciello lui-même, son appel a été dirigé sur Wahnon… “Je ne crois pas qu’il venait juste d’arriver dans le bureau. Il est beaucoup plus probable que le lobby pro-Israël le paie pour y être, avec la démarche de gagner de l’influence”, explique le journaliste.

Telle est la situation sordide d’une démocratie minée par les partisans de l’apartheid israélien – et de puissances qui ne s’en soucient guère.


- Source : Pour la Palestine

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