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Mardi, 16 Avr. 2024

En catimini, le gouvernement étend le champ du secret des affaires

Auteur : Emmanuel Lévy | Editeur : Walt | Mardi, 22 Sept. 2020 - 09h41

Secret des affaires renforcé, assouplissement des règles sur les marchés publics, multiplication des autorisations de légiférer par ordonnances, notamment sur le financement des chambres d’agriculture. Sans opposition ou presque, le gouvernement s’en donne à coeur joie à l’Assemblée nationale pour déréguler et déréglementer.

C’est un étrange clin d’oeil que les amoureux du franglais apprécieront. Actuellement examinée en première lecture à l’Assemblée nationale, la loi d’Accélération et simplification de l’action publique, dite, "ASAP", dispose du même sigle que l'expression anglo-saxonne As soon as possible. Et ce n’est pas vraiment volé.

ASAP, qui veut dire "aussi vite que possible en français", décrit bien le fond et la forme de ce texte qui est en passe de s’imposer comme le document le plus puissant de déréglementation et de dérégulation de la Macronie. Le tout, sous couvert de crise sanitaire. Si, à la faveur d'un fait divers, la presse a bien vu l’amendement inventant le concept de “résidence occasionnelle”, un ovni juridique visant à lutter contre les squatters, l'essentiel est pourtant ailleurs. Outre le texte en lui même, ce sont les amendements présentés par le gouvernement qui détonnent. Sans opposition, ou presque, le gouvernement la joue facile. Car Contrairement au projet de loi lui-même, qui doit être soumis au Conseil d’Etat pour validation juridique et être accompagné d’une étude d’impact, les amendements, eux, échappent à cette double contrainte.

Secret des affaires renforcé

On l'observe ainsi avec l'amendement 627. Comme le mentionne l’exposé des motifs, son objectif est de « la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation, exigence constitutionnelle, justifie en effet que des procédures adaptées soient mises en œuvre dans la conduite de telles opérations afin de préserver la confidentialité des informations sensibles qui s’y rapportent». Ca envoie du lourd en matière d’argumentation pour modifier le code de l'environnement qui permet au citoyens d'avoir accès aux éléments qui sont de nature à avoir un impact environnemental ou sanitaire, mais la traduction est on ne peut plus claire en matière de restrictions: « ne peuvent être ni communiqués, ni mis à disposition du public des éléments (...) dont la divulgation serait de nature à porter atteinte à des secrets de fabrication ou au secret des affaires ».

Et voilà comment, au détour de ce projet de loi, le secret des affaires, qui a fait l’objet d’un texte fort critiqué en 2018, sort encore renforcé grâce à l'ASAP. « Cet amendement permet également aux préfet de délivrer des autorisations temporaires d'installation de sites avec des risques industriels, autorisations qui jusqu'ici relevaient d'autorisations environnementales ministérielles », s'emporte la député de la Meuse Emilie Cariou, qui a récemment quitté le groupe majoritaire pour fonder le Groupe Écologie démocratie solidarité. Une performance, moins d'un an après l'explosion de Lubrizol à Rouen...

Modification des règles de la commande publique

Quatre autres amendements gouvernementaux, tous également adoptés, viennent modifier sensiblement les règles de la commande publique. Tous dans le même sens : moins de concurrence, moins d’appel d’offres, toujours plus de possibilité de renouveler implicitement les contrats, et notamment les très sensibles contrats de concession.

Cette loi montre bel et bien l'orientation du gouvernement : moins de régulation économique, moins de réglementation. Avec le plan de relance centré sur les entreprises, c'est l'autre jambe d'une politique de l'offre.


- Source : Marianne

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