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Le Business de la famille Maxwell – Isabel Maxwell : La « porte dérobée » d’Israël dans la Silicon Valley (2ème partie)

Auteur : Whitney Webb | Editeur : Walt | Mardi, 28 Juill. 2020 - 07h28

En évoluant dans « les mêmes cercles que son père » et en s’engageant à « ne travailler que sur des choses qui concernent Israël », Isabel Maxwell est devenue une liaison essentielle pour l’entrée dans la Silicon Valley des entreprises technologiques liées aux services de renseignement israéliens, avec l’aide des deux cofondateurs de Microsoft, Paul Allen et Bill Gates.

Ceci est la deuxième partie de la série « Le business de la famille Maxwell » et se concentre sur Isabel Maxwell.

En 1992, le gouvernement israélien a créé le programme Yozma à l’instigation du scientifique en chef du Ministère israélien de l’Industrie et du Commerce – Yigal Erlich – alors que ce dernier s’apprêtait à quitter ce poste. Le programme Yozma visait à « encourager l’investissement à risque » en créant des fonds de capital-risque liés à l’État, qui ont ensuite donné naissance à une myriade de start-ups israéliennes de haute technologie en les fusionnant avec de grandes sociétés technologiques étrangères. Selon le site web d’Erlich, il avait fait pression sur le gouvernement israélien pour lancer Yozma parce qu’il avait « identifié une défaillance du marché et un besoin énorme en Israël d’établir pour la première fois une industrie de capital-risque gérée professionnellement qui financera la croissance exponentielle des entreprises de haute technologie en provenance d’Israël ». Il a ensuite « convaincu le gouvernement israélien d’allouer 100 millions de dollars à sa vision du capital-risque ».

La vision d’Erlich allait également entraîner la fusion du secteur de la haute technologie israélien, qu’il a contribué à créer, avec l’appareil de renseignement israélien, avec de nombreux conglomérats israéliens de haute technologie créés avec le financement du programme Yozma et ses successeurs, doublant ainsi les outils d’espionnage israélien. Notamment, peu de temps avant qu’Erlich ne convainque Israël de placer 100 millions de dollars dans ce programme, les services de renseignement israéliens, grâce en grande partie au travail du tristement célèbre maître de l’espionnage Rafi Eitan, avaient appris les avantages de placer des portes dérobées pour leurs services de renseignement dans des logiciels commerciaux par le vol et la subversion du logiciel PROMIS. Comme indiqué dans la première partie de cette série, la version boguée de PROMIS en Israël a été largement commercialisée par Robert Maxwell.

Après la création du programme Yozma, le premier fonds de capital-risque qu’il a créé s’appelait Gemini Israel Ventures et le gouvernement israélien a choisi un homme nommé Ed Mlavksy pour le diriger. Mlavksy, à l’époque, était le Directeur Exécutif de la Fondation Binationale israélo-américaine pour la Recherche et le Développement Industriels (BIRD), dont Erlich était le président du comité exécutif. Mlavsky déclare que, lorsqu’il dirigeait la fondation BIRD, « il était responsable d’investissements de 100 millions de dollars dans plus de 300 projets communs entre des entreprises de haute technologie américaines et israéliennes ». Les liens de BIRD avec Gemini Israel Ventures et le programme Yozma en général sont intéressants, étant donné que – quelques années auparavant – la fondation avait fait l’objet d’un examen minutieux pour son rôle dans l’une des pires affaires d’espionnage de l’histoire des États-Unis – l’affaire Jonathan Pollard.

Jonathan Pollard était un analyste du renseignement naval devenu espion israélien qui a transmis aux services de renseignement israéliens, et plus précisément à la défunte agence d’espionnage Lekem, des documents concernant la technologie militaire américaine (en particulier la technologie nucléaire) ainsi que des opérations clandestines des services de renseignement américains. Le responsable de Pollard n’était autre que Rafi Eitan, qui avait orchestré le rôle démesuré d’Israël dans le scandale du logiciel PROMIS. Dans l’acte d’accusation d’espionnage de Pollard, il a été noté que Pollard a livré des documents à des agents d’Israël à deux endroits, dont un appartement appartenant à Harold Katz, le conseiller juridique de la fondation BIRD et conseiller de l’armée israélienne, qui supervisait Lekem. Des représentants du gouvernement ont déclaré au New York Times à l’époque qu’ils pensaient que Katz « avait une connaissance approfondie du réseau d’espionnage [Pollard] et qu’il pourrait impliquer de hauts responsables israéliens ».

La journaliste Claudia Wright, écrivant en 1987, a ouvertement spéculé sur la question de savoir si les liens étroits entre Katz et les responsables de Pollard signifiaient que la fondation BIRD avait été utilisé pour passer des fonds à Pollard ou que les fonds de BIRD, dont la plupart étaient apportés par les contribuables américains par opposition aux prétentions publiques de financement « conjoint », avaient été utilisés pour payer Pollard pour ses « services » à Israël. Dans son article, elle note que Mlavsky disposait d’un pouvoir discrétionnaire considérable sur l’utilisation de ces fonds alors que le fonctionnaire américain chargé de superviser les intérêts américains au sein de BIRD « ne savait pas comment les investissements sont réglementés » par la fondation. En outre, aucun fonctionnaire américain n’a eu accès à un audit de la fondation, qui aurait été réalisé par un cabinet comptable basé en Israël et ne disposant pas de bureaux aux États-Unis. Le New York Times a noté à l’époque que Katz en particulier « pourrait avoir connaissance de la méthode utilisée pour payer Pollard, qui a reçu des dizaines de milliers de dollars de ses employeurs israéliens ».

Après que Mlavsky de BIRD ait été choisi pour diriger Gemini Israel Ventures, l’une des premières sociétés dans lesquelles la firme a investi s’appelait CommTouch (aujourd’hui connue sous le nom de Cyren et détenue majoritairement par Warburg-Pincus). Fondée en 1991 par Gideon Mantel, un ancien officier d’une « unité spéciale de déminage » des Forces de Défense Israéliennes (FDI), aux côtés d’Amir Lev et de Nahum Sharfman, CommTouch s’est d’abord concentrée « sur la vente, la maintenance et l’entretien de logiciels clients de courrier électronique autonomes pour ordinateurs centraux et personnels ». Ils ont spécifiquement courtisé les Fabricants d’Équipements d’Origine, c’est-à-dire les entreprises dont les produits sont utilisés comme composants dans les produits d’une autre entreprise qui sont ensuite vendus aux utilisateurs finaux. L’intégration de ses produits dans ceux des principaux développeurs de logiciels et de matériel informatique permettrait aux produits de CommTouch d’être largement utilisés mais invisibles. C’est ce qu’indique un article de Wired sur CommTouch, qui précise que les produits CommTouch sont censés « être aussi transparents et imperceptibles que le cuivre l’est pour un utilisateur de téléphone ».

Cependant, depuis sa fondation jusqu’au début de 1997, CommTouch a lutté pour se maintenir à flot, incapable de faire des bénéfices et incapable d’obtenir des contrats importants ou de développer son entreprise au-delà de 25 employés. Pourtant, grâce à Gemini Israel Ventures et aux « subventions » du gouvernement israélien, qui ont été utilisées pour financer la recherche et le développement de ses produits, CommTouch a réussi à se maintenir à flot. En 2006 encore, CommTouch notait dans des documents officiels que l’entreprise « a un historique de pertes et pourrait ne jamais atteindre la rentabilité », ajoutant qu’elle subissait des millions de dollars de pertes nettes par an. Il est clair que la décision de Gemini Israel Ventures et du gouvernement israélien de continuer à verser de l’argent dans une entreprise décidément non rentable pendant plusieurs années a été motivée par autre chose que le profit.

Au début de 1997, CommTouch a décidé d’entrer sur le marché américain et a commencé à chercher un nouveau président pour l’entreprise qui avait « une influence locale ». « Nous savions exactement ce que nous recherchions », a déclaré plus tard Gideon Mantel à Wired au sujet de la recherche de CommTouch, « Quelqu’un qui connaît son chemin dans la vallée ». Ils ont trouvé leur femme dans la fille du « super-espion » israélien par excellence et vendeur de PROMIS, Isabel Maxwell.

Un pedigree intriguant

Mantel et CommTouch auraient choisi de courtiser Isabel Maxwell pour la présidence de leur entreprise par le biais d’une société de placement non spécifiée et auraient été « attirés par son expertise et sa perspicacité dans la Silicon Valley lorsqu’ils l’ont recherchée ». Le quotidien israélien Globes affirme que Gideon Mantel « est allé voir Isabel Maxwell dès son arrivée dans la Silicon Valley et a réalisé que pour progresser, une entreprise de solutions de courrier électronique comme CommTouch avait besoin de l’aide de quelqu’un qui connaissait les règles du jeu ». Wired offre un portrait similaire, ajoutant que c’est « Gideon Mantel [qui] a convaincu Isabel Maxwell d’accepter le poste ».

Mantel a déclaré à Jewish Weekly que bien que le pedigree de Maxwell, c’est-à-dire être la fille de Robert Maxwell, « était très intriguant au début… ce n’est pas son nom qui a pris la décision pour nous. » Cependant, Mantel, dans des rapports séparés, compare Isabel à son père à de nombreuses reprises lorsqu’il fait l’éloge de ses capacités professionnelles. Par exemple, il a déclaré à Haaretz qu’Isabel « n’est intimidée par personne, et elle ne cède jamais… Elle a tout cela en elle. Ils lui ont appris à poursuivre les choses et à ne pas abandonner ». De même, il a déclaré à Wired que « Comme son père, elle est une battante », ajoutant plus tard que « Elle charge toujours. Elle n’a pas peur. Bien sûr, cela vient de son père. C’est dans son sang ». Étant donné que Robert Maxwell est rarement reconnu à titre posthume (dans les médias en tout cas) comme « un battant » et « sans peur », il va sans dire que Mantel le considère avec un degré de vénération qu’il associe également à sa fille Isabel.

Isabel, notamment, a elle-même déclaré à plusieurs reprises que son acceptation de l’offre de Mantel d’être Présidente de CommTouch était également motivée par les liens controversés de son père avec Israël. Elle a déclaré au Haaretz que les raisons pour lesquelles elle avait accepté la présidence de CommTouch venaient « du cœur » car c’était « une chance de poursuivre l’engagement de son père en Israël », ce qui l’a amenée à rejeter d’autres offres d’emploi plus lucratives de sociétés réellement établies qu’elle avait reçues à l’époque. Elle a également décrit les raisons pour lesquelles elle a rejoint CommTouch au Jewish Weekly comme « une affaire de cœur », ajoutant que « cela avait à voir avec mon père et mon histoire ». Le New York Times l’a citée en disant qu’elle avait « envisagé d’autres start-ups Internet basées en Californie [en 1997], mais qu’elle avait ressenti un attrait pour CommTouch et la connexion israélienne ».

Isabel a des vues intéressantes sur son père, qu’elle décrit comme « l’ultime survivant« , et sur son implication en Israël. Elle le décrit comme « très complexe », ajoutant qu’elle ne le « met pas sur un piédestal », mais dit néanmoins qu’elle est « fière » de son héritage controversé et que « s’il était vivant aujourd’hui, il serait fier de nous aussi ». Elle a tenu des propos similaires à ceux du Guardian en 2002, déclarant que « je suis sûre que [mon père] serait ravi de savoir ce que je fais maintenant »… en rejetant la tête en arrière et en riant fort ». En outre, lorsqu’on lui a demandé qui avait été la personne la plus influente dans sa vie, Isabel a répondu : « Mon père a été le plus influent dans ma vie. C’était un homme très accompli et il a atteint beaucoup de ses objectifs au cours de sa vie. J’ai beaucoup appris de lui et j’ai fait miennes beaucoup de ses méthodes ».

Isabel a déclaré au Haaretz à peu près à la même époque que « Quand j’étais avec lui [son père], je sentais le pouvoir. Comme si j’étais à la Maison Blanche… Au-delà de ça, c’était un pouvoir collectif, pas mon pouvoir personnel. Je faisais partie de cette unité », faisant apparemment référence à ses autres frères et sœurs, dont Ghislaine et Christine, et suggérant qu’ils étaient collectivement des extensions du pouvoir de leur père.

Cependant, Isabel se distingue de ses autres frères et sœurs, et même de Ghislaine, par son sens de la loyauté envers son père et envers l’État d’Israël. Selon Elizabeth Maxwell, la mère d’Isabel, Isabel « est également fidèle à la mémoire de son père, et à ce que le judaïsme représente dans sa vie. Tous mes enfants ont été élevés comme des anglicans, mais Isabel était très attachée à la foi juive et à la politique en Israël » par rapport à ses autres enfants, dont Ghislaine.

En effet, Isabel a des relations étroites avec plusieurs anciens hauts fonctionnaires du Mossad et chefs d’État israéliens, plusieurs de ces relations ayant été « forgées par son père« . Un rapport maintenant épuré publié par le Jerusalem Post en 2003, intitulé « Isabel Maxwell Fights Back », note que « Maxwell voyage dans les mêmes cercles que son père, mais elle est plus à l’aise derrière la caméra, pas devant… elle perpétue l’héritage de son père en Israël, bien qu’à sa manière ». Le rapport note également qu’en 2003, Isabel se rendait en Israël tous les mois, se rendant sur la tombe de son père sur le Mont des Oliviers au moins une fois par visite.

La partie la plus intéressante de l’article du Jerusalem Post, est sans doute la façon dont Isabel considère l’héritage de son père. En parlant du livre de Gordon Thomas et de Martin Dillon, « Robert Maxwell, le super-espion d’Israël : La vie et la mort d’un magnat des médias », Isabel – même si elle a participé à des interviews pour le livre – a rejeté la prémisse selon laquelle son père était un « espion » et a mené une campagne de diffamation privée contre le livre et ses auteurs avant sa publication.

Elle ne s’oppose pas au contenu du livre concernant les activités de son père au nom d’Israël, y compris son rôle dans le scandale du logiciel PROMIS ou Iran-Contra, mais s’oppose simplement à l’utilisation du mot « espion » pour décrire ces activités. Mon père était certainement un « patriote » et il aidait à soutenir les affaires et les canaux politiques entre les gouvernements », a déclaré Isabel au Jerusalem Post, « mais cela ne fait pas de lui un « espion ». On peut donc dire qu’Isabel considérera sa carrière ultérieure « dans les affaires et la politique » dans les « mêmes cercles que son père » comme tout aussi « patriotique ». Cependant, pour ceux qui considèrent son père comme un « espion » pour ses activités, cela signifierait également étendre la même chose à Isabel, qui s’identifie elle-même comme Israélienne.

Outre les liens de son père avec les services de renseignement israéliens, il convient de noter que l’histoire d’Isabel – jusqu’au moment où elle a rejoint CommTouch – l’a amenée à travailler pour la société écran des services de renseignement israéliens utilisée par son père pour vendre aux États-Unis des logiciels PROMIS sur écoute, Information on Demand, puis le moteur de recherche Magellan, dont elle partageait la propriété avec sa sœur Christine (dont les liens avec les services de renseignement américains seront examinés dans la quatrième partie) et sa sœur Ghislaine, une maître-chanteur sexuel et une trafiquante sexuelle opérant pour le compte des services de renseignement américains et israéliens. Le passé d’Isabel avec Magellan et Information on Demand était clairement connu de CommTouch au moment de l’embauche d’Isabel. Il convient également de noter que, à plusieurs reprises, Isabel attribue le succès de CommTouch aux liens de tous ses employés israéliens avec l’armée et les services de renseignement militaires israéliens, ce qui a entraîné – selon Isabel – une « éthique de travail tenace » et une « mentalité à toute épreuve » parmi sa main-d’œuvre israélienne.

Comme nous le verrons plus en détail dans la troisième partie de cette série, en quittant CommTouch, Isabel a approfondi ses liens déjà étroits avec d’éminents hommes politiques et responsables des services de renseignement israéliens, en servant aux côtés d’anciens directeurs du Mossad et en comptant d’anciens chefs des services de renseignement et chefs d’État israéliens parmi ses « amis de la famille » et ses partenaires commerciaux. Cette implication s’est poursuivie pendant la période où son fils a obtenu un poste important au bureau des affaires du Moyen-Orient du Département d’État, alors que celui-ci était dirigé par Hillary Clinton, qui – comme beaucoup le savent maintenant – a des liens étroits et controversés avec la sœur d’Isabel, Ghislaine.

Les co-fondateurs de Microsoft ont mis CommTouch « sur la carte »

Lorsqu’elle a accepté le poste dans l’entreprise technologique israélienne, la promotion de Maxwell a été qualifiée de « presque messianique« , même si son enthousiasme a été décrit comme « difficile à sonder » étant donné les performances médiocres de l’entreprise et de ses produits. Cependant, peu après être devenue Présidente de CommTouch, ses relations personnelles avec des personnalités de la Silicon Valley – forgées grâce à son travail passé chez Magellan – ont porté leurs fruits et la société a annoncé de nouveaux partenariats avec Sun Microsystems, Cisco et Nippon Telephone and Telegraph, entre autres. Chez CommTouch, Maxwell a géré « toutes les activités de vente et de marketing pour CommTouch et a codirigé le développement stratégique de l’entreprise ».

Certains rapports ont noté que les relations de Maxwell avec des personnalités de la Silicon Valley ont été la clé de sa réussite professionnelle, Globes faisant remarquer que « tous ceux qui ont travaillé en étroite collaboration avec Maxwell disent que son avantage réside dans sa capacité à aider à pénétrer le marché avec un nouveau produit en ouvrant les bonnes portes », un « avantage » également attribué à son père alors qu’il vendait des logiciels PROMIS pour le compte des services de renseignement israéliens. Pourtant, malgré le penchant d’Isabel pour « l’ouverture des bonnes portes », les rapports de Maxwell, bien après le début de sa carrière chez CommTouch, qualifient toujours la société de « développeur de logiciels obscurs« .

Cependant, parmi toutes les alliances et les partenariats qu’Isabel a négociés au début de sa carrière chez CommTouch, ce sont ses relations avec les cofondateurs de Microsoft, Bill Gates et Paul Allen, qui ont permis à CommTouch d’être « sur la carte« . Maxwell avait déjà négocié un accord important avec Bill Gates de Microsoft à l’époque où elle était Vice-Présidente Exécutive du groupe McKinley/Magellan, ce qui avait conduit Microsoft à annoncer que Magellan, dont Maxwell était propriétaire, serait le moteur de l’option de recherche du service MSN de la société.

Pourtant, il semble que les co-fondateurs de Microsoft aient fait bien plus que mettre CommTouch « sur la carte », mais qu’ils aient fini par empêcher l’effondrement de son offre publique initiale, un sort qui avait frappé la précédente société d’Isabel Maxwell, le groupe McKinley, peu de temps auparavant. En effet, CommTouch a continué à repousser son introduction en bourse jusqu’à l’annonce, en juillet 1999, d’un investissement massif de la part d’entreprises liées au cofondateur de Microsoft, Paul Allen.

L’investissement de Vulcan Ventures Inc. et de Go2Net Inc. d’Allen a entraîné un bond de « l’intérêt pour la vente d’actions et pour CommTouch, jusqu’à présent un obscur développeur de logiciels », selon un rapport de Bloomberg, et a également gonflé le cours de leur action juste avant leur entrée en bourse. L’argent de l’investissement lié à Allen serait spécifiquement utilisé « pour développer les ventes et le marketing et renforcer sa présence sur les marchés internationaux ». La décision d’Allen d’investir dans la société semble étrange d’un point de vue financier, étant donné que CommTouch n’avait jamais réalisé de bénéfices et avait enregistré plus de 4 millions de dollars de pertes l’année précédente. Pourtant, grâce à l’investissement opportun d’Allen et à une coordination apparente avec les retards répétés de l’introduction en bourse de la société, CommTouch était évaluée à plus de 230 millions de dollars lorsqu’elle est entrée en bourse, contre 150 millions de dollars quelques semaines avant l’investissement d’Allen.

On ne sait pas exactement pourquoi Paul Allen est venu à la rescousse de l’introduction en bourse de CommTouch et ce qu’il espérait tirer de son investissement. Toutefois, il convient de souligner qu’Allen faisait partie des membres d’une communauté en ligne exclusive d’élites créée en 2004 et appelée « Small World », dont les membres comprenaient également Jeffrey Epstein et des personnalités liées à Epstein comme Lynn Forester de Rothschild et Naomi Campbell, ainsi que Petrina Khashoggi, la fille d’Adnan Khashoggi, un ancien client d’Epstein. Le plus grand actionnaire de Small World était Harvey Weinstein, le magnat des médias aujourd’hui en disgrâce, qui était un partenaire d’affaires d’Epstein et qui a depuis été accusé par un certain nombre de femmes d’abus sexuels.

Moins de trois mois après les investissements d’Allen dans CommTouch en octobre 1999, la société a annoncé qu’elle avait conclu un accord important avec Microsoft, aux termes duquel « Microsoft utilisera le service CommTouch Custom MailTM pour fournir des solutions de courrier électronique en ligne sous marque privée à certains partenaires MSN et sur les marchés internationaux ». En outre, selon l’accord, « CommTouch fournira le service MSN Messenger et Microsoft Passport à ses clients tout en s’appuyant sur son expertise de Windows NT en soutenant les futures technologies de messagerie MSN ».

L’accord a été conclu moins de deux ans après que Microsoft ait acheté Hotmail, qui – jusqu’à l’accord CommTouch/Microsoft – était l’un des principaux concurrents de CommTouch pour ses services de courrier électronique sur le web. En d’autres termes, cela signifiait que Microsoft utiliserait le logiciel « en coulisses » de CommTouch comme épine dorsale de ses services de courrier électronique sur le web, dont Hotmail. « Nous sommes impatients de renforcer notre relation avec Microsoft en intégrant d’autres produits Microsoft de pointe », a déclaré Gideon Mantel de CommTouch lors de l’annonce publique de l’opération.

En décembre 1999, Microsoft a alors annoncé qu’il avait investi 20 millions de dollars dans l’entreprise en achetant 4,7% des actions de CommTouch. Cette annonce a fait passer le cours de l’action de CommTouch de 11,63 dollars à 49,13 dollars en quelques heures seulement. Une partie de cette transaction avait été finalisée par Richard Sorkin, un directeur de CommTouch récemment nommé. Sorkin venait de devenir multimillionnaire suite à la vente de Zip2, la première entreprise d’Elon Musk dont il était le PDG.

Il semble en outre que Bill Gates, alors à la tête de Microsoft, ait investi personnellement dans CommTouch à la demande d’Isabel Maxwell. Dans un article publié en octobre 2000 dans le Guardian, Isabel « plaisante sur le fait de persuader Bill Gates de s’investir personnellement » dans CommTouch à un moment donné pendant cette période.

L’article note ensuite curieusement ce qui suit concernant Isabel Maxwell et Bill Gates :

« Avec un faux accent du sud, [Isabel] ronronne : « Il doit dépenser 375 millions de dollars par an pour conserver son statut d’exonération fiscale, pourquoi ne pas me permettre de l’aider ». Elle explose de rire ».

Étant donné que des individus aussi riches que Gates ne peuvent pas avoir de « statut d’exonération fiscale » et que cet article a été publié peu après la création de la Fondation Bill et Melinda Gates, les déclarations d’Isabel suggèrent que c’est le Bill and Melinda Gates Foundation Trust, qui gère les actifs de la fondation, qui a effectué cet investissement important dans CommTouch. En outre, il convient de souligner l’étrange manière dont Isabel décrit ses relations avec Gates, en parlant de ses interactions avec lui d’une manière qu’on ne trouve dans aucune des nombreuses autres interviews d’Isabel sur des sujets très variés (par exemple, « ronronner », parler avec un faux accent du Sud). Ce comportement étrange peut avoir un lien avec les précédentes interactions d’Isabel avec Gates et/ou la relation mystérieuse entre Gates et Epstein, à laquelle il est fait allusion dans un article du Evening Standard de 2001, et les témoignages de témoins oculaires concernant les commentaires d’Epstein et de Ghislaine Maxwell sur Bill Gates en 1995, abordés dans la première partie de cette série.

Après 2000, les activités et le pouvoir de CommTouch se sont rapidement développés, et Maxwell a ensuite attribué à l’investissement de Microsoft dirigé par Bill Gates et de Paul Allen le changement de situation de la société. Maxwell, cité dans le livre « Fast Alliances » de 2002, déclare que Microsoft considérait CommTouch comme un « réseau de distribution » clé, ajoutant que « l’investissement de Microsoft en nous a permis de nous faire connaître ». Il nous a donné une crédibilité instantanée, a validé notre technologie et notre service sur le marché ». À cette époque, les liens de Microsoft avec CommTouch s’étaient approfondis avec de nouveaux partenariats, dont l’hébergement de Microsoft Exchange par CommTouch.

Bien qu’Isabel ait réussi à obtenir des alliances et des investissements lucratifs pour CommTouch et à voir ses produits intégrés dans des composants logiciels et matériels clés produits et vendus par Microsoft et d’autres géants de la technologie, elle n’a pas réussi à inverser la tendance des résultats financiers désastreux de l’entreprise, CommTouch ayant enregistré une perte de 4,4 millions de dollars en 1998 et des pertes similaires pendant une bonne partie des années 2000, avec des pertes nettes totalisant 24 millions de dollars en 2000 (juste un an après les investissements considérables de Microsoft, Paul Allen et Bill Gates). Les pertes ont continué même après qu’Isabel ait officiellement quitté la société et soit devenue Présidente Émérite en 2001. En 2006, l’entreprise était endettée de plus de 170 millions de dollars.

La liaison entre Israël et la Silicon Valley par une seule femme

Isabel Maxwell quittera son poste à CommTouch en 2001, mais restera Présidente Émérite pendant des années, conservant une part importante des actions de CommTouch, alors évaluée à environ 9,5 millions de dollars. Alors que Maxwell restait présidente honoraire, CommTouch ajoutait à son conseil d’administration Yair Shamir, fils de l’ancien Premier Ministre israélien et ami de Robert Maxwell, Yitzhak Shamir. Yair Shamir, Président de l’entreprise publique israélienne IAI (Israeli Aerospace Industries) lorsqu’il a rejoint le conseil d’administration de CommTouch, avait auparavant dirigé Scitex lorsque la société était la propriété de Robert Maxwell. Quelques années plus tard, après avoir failli s’effondrer en raison de sa dette de longue date, CommTouch a été rebaptisée Cyren et, aujourd’hui, fonctionne en arrière-plan des produits de Microsoft, Google, Intel, McAfee et Dell, parmi beaucoup d’autres.

Haaretz a écrit en 2002 qu’Isabel, alors que CommTouch était dans une situation financière difficile, avait décidé de « ne travailler que sur des choses impliquant Israël ». Même l’échec de CommTouch, la société Internet israélienne qu’elle dirigeait, ne l’a pas dissuadée : Elle croit toujours en ce média, et elle croit toujours en Israël ». Maxwell se créera ensuite « un créneau unique dans le domaine de la haute technologie en tant que liaison entre les entreprises israéliennes en phase de développement initial et les investisseurs providentiels privés aux États-Unis » en tant que consultant privé, puis créera Maxwell Communications Network en 2006. Cette société offrait « des communications transfrontalières, des financements et des études de marché aux principaux investisseurs en capital-risque et aux entreprises de haute technologie aux États-Unis et en Israël ». Toutefois, elle note que sa « spécialité » était « d’aider les entreprises israéliennes de haute technologie ».

Pendant cette période (2001-2006), Isabel dirigera également une entreprise technologique israélienne qui « protège les enfants en ligne », à une époque où sa sœur – Ghislaine Maxwell – abusait et trafiquait activement des enfants dans le cadre d’une opération liée au renseignement aux côtés de Jeffrey Epstein. Isabel a accepté le poste chez iCognito (aujourd’hui Pure Sight) « parce qu’elle [la société] est en Israël, et à cause de sa technologie ». Elle a également rejoint le conseil d’administration de la société israélienne Backweb aux côtés de Gil Shwed, un célèbre ancien de l’Unité 8200 (souvent comparé à l’équivalent israélien de la NSA) et co-fondateur du géant israélien de la technologie Check Point, qui est un partenaire de longue date de CommTouch.

L’implication étroite d’Isabel avec d’anciens chefs d’État et chefs de services de renseignement israéliens ne fera que s’approfondir après son départ de CommTouch, notamment avec l’ancien Premier ministre israélien Shimon Peres. Le Jerusalem Post a décrit la relation Pérès-Isabel comme « étroite » et « forgée par son père ». Isabel était également en contact étroit avec l’ancien directeur adjoint du Mossad David Kimche (jusqu’à sa mort en 2010) et l’ancien chef des renseignements militaires israéliens et Premier Ministre Ehud Barak. Notamment, Ehud Barak, en plus d’être un acteur majeur de la scène hi-tech israélo-américaine, était également étroitement associé à Jeffrey Epstein et à la sœur d’Isabel, Ghislaine, ayant recruté Epstein pour les services de renseignement militaire israéliens et supervisant l’agence Lekem au moment du scandale PROMIS et de l’affaire Pollard ainsi que l’implication d’Israël dans l’affaire Iran-Contra. Barak était également un visiteur fréquent de l’île d’Epstein et a dormi dans les appartements new-yorkais qui appartenaient au frère d’Epstein et qui abritaient de nombreux « esclaves sexuels » mineurs d’Epstein.

Il est également remarquable que Ghislaine Maxwell et Jeffrey Epstein se soient eux-mêmes impliqués dans le monde d’Isabel, c’est-à-dire le lien croissant entre la Silicon Valley et Israël, courtisant et faisant prétendument chanter de grands cadres de la Silicon Valley tout en investissant dans des start-ups liées aux services de renseignement israéliens. Pendant cette période, Isabel a été un acteur majeur dans les réseaux de capital-risque et d’autres organisations visant à développer les liens entre les start-ups israéliennes liées aux renseignements et les entreprises technologiques américaines, ce qui fait maintenant partie d’une opération de renseignement israélienne ouvertement admise (dans laquelle Microsoft joue un rôle majeur). Les liens d’Isabel, Ghislaine et Epstein avec ce monde de haute technologie qu’est l’espionnage israélien, ainsi que le fait qu’Isabel ait inspiré ce qui allait devenir le projet TerraMar de Ghislaine et ses liens avec des groupes puissants comme le Forum Économique Mondial et même le Département d’État dirigé par Hillary Clinton, seront examinés dans le prochain épisode de cette série.

Le business de la famille Maxwell : Espionnage (1ère partie)

Traduit par Réseau International


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