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Vendredi, 29 Mars 2024

Réforme des retraites : le simulateur du gouvernement qui vous donne (presque) toujours gagnant

Auteur : Emmanuel Lévy | Editeur : Walt | Samedi, 21 Déc. 2019 - 15h48

Les simulations données par le Secrétariat d’Etat des retraites sont très optimistes. Trop. Selon les calculs exclusifs de Marianne, le gouvernement fait l’hypothèse d’une hausse annuelle des salaires deux fois supérieure à la réalité observée depuis dix ans. Gonflé !

Le gouvernement enjolive-t-il ses calculs pour faire passer la pilule de sa réforme ? A la lecture d’Aujourd’hui Le Parisien et à l’écoute de RTL jeudi 19 décembre, la question se pose. A défaut de simulateur individuel, nos confrères qui relaient les chiffres élaborés par les équipes du secrétaire d’Etat chargé des retraites, ont publié 7 cas types….Et à de très rares exceptions près, la retraite par point ne fait... que des gagnants !

C’est l’école des Fans des retraités. Les croquis l’assurent. A titre d’exemple, le système universel à point génère ainsi un gain de 223 € à une secrétaire née en 1980 qui prend sa retraite à 65 ans, après une carrière au SMIC. A peine trois euros de perdu pour un professeur des écoles de la même génération qui la suit elle aussi dans la retraite à 65 ans. Le grand gagnant est à chercher du côté du cadre sup: +1767 euros pour un départ à 67 ans.

De très généreuses simulations

Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup. D’abord, l'âge pivot de 64 ans n’est pas pris en compte. Mais la manip’ se trouve ailleurs : la note méthodologique indique que «l’inflation est neutralisée dans l’ensemble des simulations (les pensions sont donc en euros constants 2019). En revanche, la croissance des revenus est conservée.» Elle mentionne également que «dans le privé, les salaires comme les revenus des indépendants augmentent au même rythme que la croissance économique. De manière analogue aux projections du Conseil d'orientation des retraites (COR), le SMIC évolue comme les salaires.»

Donc, à suivre le raisonnement du gouvernement, il est possible de connaître son hypothèse d’augmentation de salaire pour faire tourner ses généreuses simulations. Il suffit de s’intéresser à ses calculs réalisés sur le salarié au SMIC. En l’occurrence, une secrétaire, âgée de 40 ans, est assurée de partir, à condition de rendre son tablier à 65 ans, avec une pension mensuelle de 1398 euros bruts d’aujourd’hui par mois. Elle bénéficie du nouveau minimal des retraites du système universel: ce montant représente 85% du SMIC en 2045, ce qui permet d'obtenir la valeur du salaire minimum à 1645 euros en net. A comparer avec les 1171 euros actuels nets. Soit une hausse en 25 ans de … 40%. Une telle augmentation équivaut une progression au rythme de 1,35% par an.

Ce qui a échappé aux syndicats

L’hypothèse du gouvernement s’avère donc particulièrement généreuse. En effet depuis 10 ans, la progression était de 0,7 % en moyenne. Deux fois moindre en somme. De quoi presque remplir de joie Jean Luc Mélenchon qui demande une hausse massive du SMIC ! Cette hypothèse de croissance sur les rémunérations est a priori appliquée à tous les autres cas types, et le sera sur leurs futurs 300 petits frères qui devraient être publiés dès janvier. Cette petite pirouette d’actuaire rappelle celle dénoncée par le “Collectif Nos retraites” en juillet. Pour ses premières simulations, Jean Paul Delevoye, l’ex-haut commissaire chargé des retraites, avait artificiellement dégradé le niveau des pensions qui seraient versées selon le système actuel pour rendre plus attractive, en comparaison, celles versées avec le système universel.

Dans les cas types récemment présentés, les points accumulés dans le système universel, qui sont indexés sur l’évolution des salaires, grossissent plus qu’ils ne le devraient, rendant plus favorables les pensions qui en découlent. Exemple : un point gagné en 2020, vaudrait 1,4 point en 2045 avec les hypothèses du gouvernement, seulement 1,19 point avec une progression des salaires de 0,7 % par an, et des écarts apparaissent et s'additionnent pour chacune des générations de points accumulés au cours de la carrière. "Ca les syndicats ne l’ont pas vu, explique Henri Sterdiniak, de l’OFCE. Depuis toujours, ils se sont battus pour que les hypothèses de progression des salaires soient le plus élevées possible. Cela permettait de garantir l'équilibre du système par répartition. Ils n'ont pas vu qu'avec la réforme instaurant le système universel, ils allaient être pris au piège de cet atavisme. Prendre 1,3 % pour la progression des salaires, c'est juste si on regarde la moyenne depuis 1980. Ce serait plus 0,7-0,8% si l'on prend la moyenne depuis 10 ans. Et ce sera vraisemblablement 0,5% à l'avenir avec les contraintes climatiques."

Poser l'hypothèse que les salaires progressent de 1,35% par an après inflation pendant 25 ans revient à assumer que la croissance de la productivité du travail, au coeur des scénarii du Conseil d'orientation des retraites (COR), est au moins supérieure à ce niveau. Et devinez quoi? Au delà de 1,3% de progression de la productivité du travail, pas besoin de réforme des retraites… Et c’est le COR qui le dit.


- Source : Marianne

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