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Billet jaune en passant : Eh bien non, Macron n’aura pas fait son coup d’Etat militaire

Auteur : Karine Bechet-Golovko | Editeur : Walt | Lundi, 25 Mars 2019 - 13h52

L’on nous annonçait l’armée, l’ordre, la force contre ce peuple jaune, qui perturbe depuis trop longtemps le shopping du week-end sans se résoudre à prendre le pouvoir. Nous n’avons eu que des dérapages hargneux de certains individus, qui confondent milice et police. Bien loin de l’ordre républicain, qui implique l’Etat, l’exercice du pouvoir. Ce pouvoir, tant fantasmé, dont tous ont peur.

Les appels incessants au pacifisme permettent d’étouffer le mouvement contestataire encore plus efficacement que l’arsenal législatif, car il brûle les intentions de l’intérieur : nous faisons la révolution en chanson, sans chanson et sans révolution. Nous marchons pacifiquement. Pour changer la société – mais sans prendre le pouvoir. Le Gouvernement ayant parfaitement compris que, effectivement, les Gilets Jaunes ne sont pas des révolutionnaires, c’est-à-dire qu’ils ne détruiront pas l’ordre existant par la force, ils ne détruiront donc pas l’ordre existant.

Ainsi, les tarifs de l’électricité seront finalement augmentés, comme la fameuse taxe carbone qui pourrait bien être restaurée. Le Gouvernement a eu peur un instant, mais puisqu’il n’y aura pas de révolution, il n’y a pas de risque réel. La politique peut donc continuer, les concessions seront techniques, non point fondamentales.

Les attaques contre l’image du mouvement n’ont pas fonctionné, le laisser-faire des destructions par le Gouvernement, comme l’a déclaré Castaner lui-même, n’a pas dissuadé. L’infiltration avec des Black blocs, bien aimés par le système puisqu’ils en font partie, n’a pas permis de désagréger le mouvement.

Donc, l’intimidation directe par les forces de l’ordre est le tournant dit « sécuritaire » voulu par Macron. Sa tentative de séduction  nationale ayant échouée, il se comporte de plus en plus comme un amant écarté. Et l’on obtient des chiffres effarants d’amendes de 135 euros à tout-va pour participation à la manifestation ou pour porter un tee-shirt demandant le RIC. Des chiffres surprenants de « contrôles préventifs » supérieurs à Paris au nombre officiel des manifestants selon la Préfecture de Police (6 825 contrôles pour 5 000 manifestants) sont lancés. Soit la Préfecture de Police ment, soit elle est dirigée par un nouveau Pinochet – elle contrôle « préventivement » non seulement tous les manifestants « officiels », mais également près de deux milliers de badauds.

Et au lieu de l’ « ordre républicain » dont parle Castaner, l’on trouve des scènes qui n’ont justement pas leur place dans une République digne de ce nom. Sans compter les attaques contre les journalistes, qui deviennent le lot de ce qui commence à dangereusement ressembler à une milice, l’on voit aussi des « médecins de rue », ces jeunes intervenants lors des manifestations de Gilets Jaunes, devenir la cible des forces de l’ordre, gazés avant d’être frappés.

Ou encore, ils sont embarqués pour un contrôle d’identité, qui dure, qui dure, qui dure...

Sans même compter cette image qui tourne en boucle et résume parfaitement qui est « l’ennemi » dans la police castanienne :

L’on commence à voir des articles dans la presse étrangère soulignant la dérive autoritaire de Macron, quand elle ne frise pas l’insulte.

Rassurez-vous, rien de tel dans la presse française, les journalistes ne se permettraient pas une poussée d’indépendance. Celle-ci, au contraire, s’extasie sur la relative hausse de popularité du Président, Jupiter est de retour.

A court terme, c’est le jeu du sur-place.

Macron annonce l’armée dans les rues, mais ne sort pas les Blacks Blocs et seuls des comportements hargneux de personnes qui n’ont pas leur place dans les forces de l’ordre sont à dénombrer, nous sommes bien loin d’un « coup d’Etat militaire », même post-moderne. Car pour l’autoritarisme aussi il faut non seulement du pouvoir, mais aussi avoir le courage de l’exercer. Il ne s’agit ici que de la vengeance du faible sur ce qu’il ne peut contrôler.

Du côté des Gilets Jaunes, la position n’est pas très claire non plus, les revendications disparates, parfois totalement dans la ligne contemporaine (climat, LGBT, etc), demanderait un peu plus de consensus. Mais l’absence objective de pensée alternative politique structurée aujourd’hui et de leaders pour la portée conduit ce mouvement à une certaine stagnation, avec tous les risques de récupération que cela comporte. Il existe pourtant un véritable mouvement de fond, avec une capacité de séisme politique que l’on n’a pas vue depuis longtemps. Mais chez les Gilets Jaunes aussi l’on voit une peur du pouvoir, une peur de l’exercer réellement. Une autolimitation, car finalement, qu’en faire de ce pouvoir sans leaders politiques ?

C’est de cette impasse que les Gilets Jaunes doivent sortir pour prendre toute leur ampleur. S’ils ne pourront pas le faire seuls, ils sont l’impulsion nécessaire. Et c’est en cela qu’ils font tellement peur, qu’ils dérangent à ce point.


- Source : Russie politics

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